L’année 2021 serait-elle l’année du rebond des cours du baril de pétrole ? La tendance le montre. Ce qui ne doit pas laisser les autorités de nombreux pays dont celles du Togo de lorgner une augmentation des prix à la pompe. Mais attention, les scandales ayant entaché le secteur ces derniers mois sont loin de s’être estompés pour donner libre cours à une revue à la hausse du litre de carburant au Togo.

Depuis janvier 2021, le prix du baril Brent ne cesse de donner des signes qui doivent faire bondir de joie les pays exportateurs de pétrole. D’au moins 50 dollars en début d’année, le prix du baril se retrouvait hier jeudi 11 février 2020 au-delà des 61 dollars. Soit 50,62 euros le baril. En décembre 2020, ce prix était de 50 dollars ou 41,1 euros. En novembre, il était de 42,7 dollars ou 36,1 euros. Quand on recule d’un mois, soit en octobre, le baril coûtait 40,2 dollars ou 34,1 euros. Au mois de septembre 2020, le baril était vendu à 40,9 dollars ou 34,7 euros. Pour le mois d’août, ce prix était de 44,8 dollars ou 38 euros. Et pour juin 2020, il était de 36 euros.

Que ce soit l’euro ou le dollar, il est évident que le prix du baril a augmenté entre juillet, mois où le Togo a procédé à une révision des prix à la pompe, et ce jour où le baril est à 61 dollars. Et donc plus de six mois sont passés sans que le gouvernement ne procède à une autre révision. Et pourtant, une loi existe bel et bien pour manager les prix des produits pétroliers.

Au Journal Officiel (JO) d’avril 2002, un Décret N°2002-029/PR portant création du mécanisme d’ajustement automatique des prix des produits pétroliers a été pris par feu Gnassingbé Eyadema et qui a balisé la voie.Sur le papier, ce mécanisme d’ajustement automatique devrait fonctionner comme suit, conformément à l’article 2 du décret : si les prix des produits pétroliers à l’importation varient à l’intérieur de la fourchette -5% à +5% bornes comprises, par rapport aux prix de la structure de référence, la marge des pétroliers supporte la totalité de la variation, les prix à la pompe et la taxe sur la Consommation des Produits Pétroliers étant fixes. Par contre si les prix à l’importation varient à l’extérieur de la fourchette -5% à +5% bornes non comprises, par rapport aux prix de la structure de référence, de nouveaux prix de vente à la pompe des produits pétroliers sont fixés par arrêté interministériel. En d’autres termes, les variations inférieures à 5% sont à la charge des pétroliers, et au-delà, ce sont les consommateurs qui les couvrent.

Quand on considère le différentiel de prix entre celui de juillet, dernière date à laquelle le Togo a procédé à une révision des prix, et celui de janvier 2021, on constate qu’il y a longtemps que la fourchette des 5% de variation est dépassée. Mais alors, pourquoi les autorités en charge du pétrole hésitent-elles à se lancer dans une revue à la hausse du prix du carburant à la pompe ? La réponse tient, à notre avis, aux secousses qui ont ébranlé la commande des produits pétroliers au Togo. Une situation que nous avons eu déjà à dénoncer dans le passé.

Les populations se sont rendu compte que le mécanisme d’ajustement des prix des produits pétroliers est une manne pour une minorité qui a très vite compris que la somme des montants négligeables n’est plus négligeable. Les prélèvements dudit mécanisme n’étaient pas reversés au trésor public et ce faisant, un groupuscule se partageait les fruits qui se chiffrent en milliards chaque année.

Ensuite, il y a la rubrique « fonds d’entretien routier » qui, elle aussi, constitue une caverne d’Ali Baba aux gestionnaires des produits pétroliers. Ainsi chaque année, entre 20 et 30 milliards FCFA disparaissent des comptes sans que personne ne s’en émeuve. Il a fallu que le gouvernement décide de procéder à une révision à la hausse des frais de péage pour qu’enfin, nous découvrions qu’en réalité, les fonds prélevés étaient de loin plus importantsque ce qui était déclaré. Les ministres du Commerce s’étant succédé à la tête de ce ministère doivent savoir beaucoup de choses sur les circuits pris par ces surplus non déclarés.

Troisièmement, les subventions chaque fois annoncées sur les prix des produits pétroliers. Nous nous attendions à voir publier le rapport d’audit consécutif au scandale relatif à la commande du pétrole. Mais non seulement l’inspection d’Etat n’a pas rendu ce rapport public, mais en plus, rien n’a été dit quant à la réalité des subventions chaque fois annoncées et comptabilisées au budget.

Mis les uns à la suite des autres, ces trois situations doivent être clarifiées et expliquées aux consommateurs afin que leur adhésion soit acquise quant à une nouvelle augmentation du prix du litre de carburant. Dans le cas contraire, il est à craindre que des mouvements spontanés reviennent au galop et rappellent les émeutes de la faim consécutifs à la hausse des prix du carburant il y a déjà quelques années dans le monde.

Le Premier ministre a déclaré vouloir « gouverner autrement ». Quoi de plus probant que ce « test pétrolier » pour lui permettre de montrer sa bonne foi !

Godson K. / Liberté N° 3326 du 12-02-21

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