Le gouvernement avait déjà averti en décembre 2020. La mise à exécution des nouveaux frais de péage entreront en vigueur à partir de demain. Mais au-delà de ces augmentations, se pose la question des chemins que prennent les fonds d’entretien routier prélevés sur chaque hectolitre depuis des lustres. Avec une transparence dans la gestion, le Togo n’a plus besoin de procéder à ces augmentations contre des usagers déjà durement éprouvés par les effets de la pandémie.

La question de l’augmentation des frais de péage devrait interpeller tous les citoyens de tous bords politiques. Etant donné que tous seront concernés. Lundi, la ministre des Infrastructures, Kassah-Traoré Zouheratou Tcha-Kondo a repris les arguments brandis en conseil des ministres le 20 décembre 2020. « De 2012 à ce jour, la moyenne annuelle de ces ressources représente 17 milliards par an qui sont composés que de 25% de droit de péage. Les 70% restants concernent les droits d’assises sur les produits pétroliers. De façon globale, selon les estimations, il faut en moyenne par an 30 milliards de FCFA pour entretenir nos routes, mais le gouvernement arrive à mobiliser seulement 17 milliards par an. Ceci demande des efforts supplémentaire à l’Etat », a-t-elle tenté de se justifier.

Dans la structure officielle des prix du mois de juillet 2020, au poste 15 sous la rubrique « Douane », il est mentionné : « Fonds d’entretien routier » : 3.500 F pour le super et le même montant pour le gas-oil. En clair, cette somme est prélevée pour le compte du fonds d’entretien routier sur chaque hectolitre (100 litres) de super et de gas-oil importé au Togo.

En octobre 2017, l’Assemblée nationale a laissé fuité la quantité de produits pétroliers commandée de janvier 2015 à octobre 2017. Et lorsqu’on effectue les calculs des sommes générées pour le fonds d’entretien routier en 2015, 2016 et jusqu’en octobre 2017 par le super et le gas-oil pris ensemble, on arrive à déterminer que ce sont plus de 53 milliards FCFA qui vont dans les caisses dudit fonds. La question est de savoir où va cette somme depuis des années.

Aujourd’hui, la ministre des Infrastructures parle de 17 milliards CFA mobilisés par le budget. Elle insiste sur un gap de 13 milliards à rechercher via l’augmentation des frais de péage. Mais quand elle prend la peine de s’intéresser aux recettes annuelles devant couvrir l’entretien des routes, elle devra réaliser qu’un différentiel de 36 milliards en moyenne disparaît chaque année sans qu’on sache comment. Ou plutôt sans qu’on veuille chercher à savoir comment. Et pour pallier le manque de ressources budgétaires, on se rabat sur les usagers de la route.

Mais il n’y pas que ces 36 milliards annuels en moyenne qui posent problème. Dans la nouvelle configuration des prix à payer aux péages, on constate que ce sont les véhicules de 5 places qui sont les plus lourdement facturés.

Jusqu’à ce matin, ces véhicules payent 300 FCFA. A partir de demain, le prix sera de 500 FCFA. Soit une augmentation de plus de 66%. Dans le même temps, les véhicules de 9 places et 15 places ne vont s’acquitter que de 600 FCFA contre 500 FCFA auparavant. Soit une augmentation de 20%.

N’oublions pas que depuis la survenue de la pandémie, le nombre de passagers à transporter par véhicule a chuté. Ce qui était déjà un manque à gagner pour les conducteurs. Avec le renchérissement des frais de péage, ce sont les voitures de 5 places qui risquent de porter encore les prix vers le haut. Toujours au détriment des passagers.

Un autre problème surviendra bientôt. Le prix du baril de pétrole a obligé le Ghana à prévenir d’une hausse du prix à la pompe dans une fourchette comprise entre 5% et 6%. Au dans ce pays, les populations sont prévenues de l’imminence de la mise à exécution de la mesure.

Au Togo, c’est la veille, au milieu de la nuit que les arrêtés interministériels se prennent pour être mis en exécution le lendemain.

Les populations sont déjà éprouvées par la pandémie. Mais le gouvernement décide d’augmenter les frais de péage ; et bientôt le prix du carburant. Alors qu’un groupuscule fait main basse sur les recettes du fonds d’entretien routier. Les ingrédients d’une situation délicate se mettent-ils en place ? Victoire Sidémého Djidudu Marie-Noëlle Tomégah-Dogbé avait promis de gouverner autrement. Aujourd’hui, les populations comprennent mieux ce que veut dire « gouverner autrement ».

Dans un pays dit de démocratie, le parlement a un rôle à jouer : celui de contre-pouvoir de l’exécutif. Mais depuis la mise en place de cette Assemblée nationale, pas une seule commission d’enquête parlementaire n’a été constituée. Et pourtant, ce ne sont pas les sujets d’intérêt qui manquent. Aujourd’hui, nous revenons sur le sujet et martelons que ce sont plus de 53 milliards que génère le fonds d’entretien routier, contrairement aux 17 milliards avancés par la ministre Kassah-Traoré Zouheratou. Il revient aux sceptiques députés de faire les arithmétiques nécessaires pour s’en rendre compte et faire ce pour quoi ils sont payés à chaque fin de mois.

Godson K. / Liberté N° 3349 du 17-03-2021

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