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Faure Gnassingbé qui avait attribué le terrain à la SIAB chez Kadhafi, change d’avis et soutient sa Conseillère

Autorisés à construire le siège de leur institution sur le terrain situé à côté de l’ancienne SGGG et face à la maison Lydia Ludic, les responsables de la Société interafricaine de Banque (SIAB) – une banque libyenne – se sont vu notifier en février dernier la suspension des travaux. Une décision de la puissante Directrice générale des Impôts, Ingrid Awadé, devant laquelle son ministre de tutelle Adji Otèth Ayassor s’est fait petit. Et après avoir engagé plus d’un milliard, selon des sources crédibles, les responsables de la SIAB sont obligés d’arrêter les travaux en se nourrissant d’une autre promesse de Faure Gnassingbé qui a pris fait et cause pour son égérie.

Faure Gnassingbé donne le terrain

Mai 2006, le chef de l’Etat togolais était à Syrte pour rencontrer le Guide libyen Mouammar Kadhafi qui s’est proclamé volontiers « second père » de Faure Gnassingbé nouvellement rentré dans le cercle fermé des « dictateurs du continent noir ». Avouons que le « fils » vouait un respect sacro-saint à son « père ». Au nom de la politique de « donnant – donnant », l’hôte togolais a, après avoir plaidé pour une aide de la Libye à son pays, fait la promesse au Guide qu’il a pris la décision d’attribuer un terrain à la SIAB pour qu’elle y construise enfin son siège. Ce qui fut fait quelques mois plus tard. Après avoir obtenu le terrain situé à côté de l’ancienne SGGG et face à la maison Lydia Ludic, les responsables de la SIAB auraient même dédommagé tous ceux qui occupaient le terrain et ceux qui faisaient le commerce aux abords. De sources dignes de foi, ils ont également fait les formalités administratives nécessaires pour avoir le titre foncier.
C’est dans cette dynamique que la cérémonie de pose de la première pierre s’est déroulée le vendredi 23 décembre 2011, en présence du ministre de l’Economie et des Finances, Adji Otèth Ayassor et des Affaires étrangères Elliot Ohin. Etaient présents à la cérémonie, côté libyen, l’ambassadeur de Libye au Togo et le directeur général de SIAB, Hosni Mohamed Giledi.

Ayassor pose la première pierre

« C’est un honneur et un grand plaisir pour moi de présider, au nom du Gouvernement togolais, cette cérémonie de pose de la première pierre du nouveau siège de la SIAB. Cet évènement marque, tout à la fois, l’aboutissement d’une longue marche, entamée depuis le mois d’octobre 2005 où les autorités de la SIAB ont décidé de contribuer au redressement de l’économie nationale, en initiant ce grand projet de construction de l’immeuble devant abriter le siège de la Banque et le démarrage effectif des travaux en vue de renforcer les performances de la banque pour sa participation accrue au financement de l’économie togolaise en plein redécollage », avait déclamé fièrement le ministre Ayassor. Ensuite, il fit une brève historique sur la Société interafricaine de Banque, issue de l’ex-Banque Arabe Libyenne Togolaise du Commerce Extérieur (BALTEX), une société de droit togolais, qui « est l’œuvre de la politique de coopération entre la Libye et le Togo et de la volonté des deux peuples de contribuer au raffermissement et au développement des liens fraternels authentiquement historiques qui les unissent ».
Parlant du projet « construction de ce siège », l’argentier du gouvernement avait dit ceci : « Après plus de 30 ans d’existence au Togo et de participation à l’économie de notre pays, la BALTEX devenue SIAB en 1992, se doit d’avoir plus de visibilité et dans ce cas, il nous revient de mettre tout en œuvre pour la soutenir. C’est ainsi que lors de sa visite officielle effectuée à Tripoli en mai 2006, son Excellence, Monsieur Faure Essozimna Gnassingbé, Président de la République, a solennellement informé les autorités libyennes de la décision du Togo, d’attribuer une parcelle de terrain de 5000 m² à la SIAB dans le cadre de ce projet. C’est le lieu de renouveler notre gratitude et notre reconnaissance au Président de la République pour sa permanente sollicitude au développement de l’économie du pays. Le Conseil d’Administration et la Direction Générale de la SIAB ainsi que moi-même, sommes engagés pour doter la Banque d’une infrastructure répondant aux normes et standards internationaux, afin de la rendre plus compétitive au sein d’un monde bancaire en pleine mutation. Le Gouvernement togolais l’a fait en ayant conscience qu’il lui revenait d’aider la SIAB, fruit des relations d’amitié et de fraternité entre les dirigeants des deux Etats à rattraper son retard ».
« Le joyau d’une architecture moderne qui va s’ériger ici dans quelques mois, conclut-il, s’inscrit dans la politique d’aménagement et de modernisation de la ville de Lomé, initiée par le Président de la République. Je tiens aussi à rendre hommage au Ministre de la ville, cosignataire de l’Arrêté portant attribution de terrain à la SIAB, qui est pleinement associé et qui partage ce moment de satisfaction et réjouissance avec nous. Je voudrais particulièrement rendre hommage aux clients de la SIAB qui ont beaucoup attendu ce jour. J’ose croire que leur satisfaction serait grande en ce jour de pose de première pierre de leur banque. Enfin, j’espère que le délai de réalisation de cet ouvrage (délai de 18 mois, NDLR) sera respecté par la banque, pour leur permettre de jouir des nouveaux produits et services qui leur seront offerts dans un cadre entièrement rénové. En s’inscrivant dans ce vaste projet et en mettant la satisfaction de la population togolaise et de la sous région au cœur de ses priorités, les autorités de la banque font preuve d’une volonté de modernisation. Ce moment est émouvant pour chacun d’entre nous. Il est l’aube d’une nouvelle ère pour la SIAB, qui est prête à relever ce défi ».

Ingrid Awadé fait cesser les travaux

Quelques mois après ce cérémonial ayant mobilisé les officiels togolais qui adorent ces occasions, les travaux ont effectivement commencé. Et le chantier étant confié à la société indienne Shapoorji Pallonji à la suite d’un appel d’offres international. Tout allait bon train. Le niveau souterrain qui demande beaucoup de temps a été fait. Les bâtisseurs se préparaient pour la dalle du rez-de-chaussée quand la Directrice générale des impôts, Ingrid Awadé, est intervenue pour suspendre les travaux. C’était le 8 février 2013. Soit dit en passant, les travaux auraient déjà coûté plus d’un milliard de FCFA.

« Courant mois d’octobre 2012, le Directeur des Affaires domaniales et cadastrales et le Chef Division du Cadastre vous avaient notifié qu’il y a un vaste plan d’aménagement de la zone comprise entre la quinzaine de la foire commerciale et le boulevard circulaire. Malgré cette notification, les travaux de construction de votre institution se poursuivent. A cet effet, il vous est demandé de suspendre toute activité sur le site dès réception de la présente », indique la lettre que nous avons reprise en fac-similé.
Extraordinaire, n’est-ce pas ? Mais c’est de cette manière que le Togo est dirigé depuis que Faure Gnassingbé a capté le pouvoir. Une décision d’une simple directrice peut annuler toutes les initiatives entreprises par son ministre de tutelle en la personne d’Adji Otèth Ayassor. Où étaient le Directeur des affaires domaniales et cadastrales, le Chef Division du Cadastre et la Directrice des impôts qui est en même temps le Conservateur de la Propriété foncière avant que ce terrain ne soit donné à la SIAB par Faure Gnassingbé et que la pose de la première pierre ait été faite par leur ministre de tutelle ? Quant à M. Ayassor qu’a-t-il fait quand Ingrid Awadé a pris cette décision ? Rien du tout. Celui qui est surnommé « ministre à la rigueur sélective » s’est fait petit, très petit devant « Maman ».

Par ailleurs, on apprend que cette anomalie dénoncée par Abass Kaboua fait partie des motifs pour lesquels il est arrêté et con duit directement en prison.
Faure Gnassingbé embrouille l’affaire avec le soutien d’Ayassor
Saisi de l’affaire, le chef de l’Etat a reçu en audience au nouveau Palais de la Présidence une délégation de la SIAB conduite par M. Salem Abdallah, Chargé d’Affaires de l’Ambassade de la Libye auprès du Togo. Le prince était assisté pour la circonstance du Premier ministre Arthème Ahoomey-Zunu, des ministres des Affaires étrangères Elliot Ohin et de l’Economie Adji Otèth Ayassor. Comme d’habitude, le chef de l’Etat n’a pas désavoué sa muse en matière financière et a déclaré tout de go qu’il avait une parfaite connaissance du fond du problème. Celui qui avait annoncé à son « père » Kadhafi qu’il allait donner un terrain à la SIAB pour son siège, a choisi de faire marche arrière. « Nous avons voulu que le problème de la SIAB soit traité dans un cadre global avec celui de LAAÏCO. La situation de l’Hôtel du 2 Février nous tient à cœur et nous préoccupe. Aujourd’hui, pour recevoir nos hôtes, nous nous débrouillons dans la ville. Avec l’état actuel du 2 Février, on risque de se retrouver dans la situation de l’Hôtel de la Paix et après, il faudra tout raser. C’est pourquoi nous avons demandé la suspension de vos travaux », aurait affirmé le chef de l’Etat.

Suite à l’intervention du Chargé d’Affaires de l’Ambassade de Libye qui a fait remarquer que le gel des avoirs de l’Etat libyen était la source des problèmes de LAAÏCO, Faure Gnassingbé aurait réitéré qu’il entendait résoudre le problème dans un cadre global incluant celui de la SIAB. « Ailleurs, les gens ont repris ce qu’ils ont donné. Le Bénin a repris. Nous, nous n’avons pas repris alors que nous avons des comptes à rendre à la population », aurait-il ajouté. Durant tout le temps qu’a duré l’audience, « l’esprit nouveau » n’avait qu’au bout des lèvres « le règlement du problème dans un cadre global avec LAAÏCO ». Pour lui, « il faut que les concertations se poursuivent pour que dans trois mois au plus, nous puissions trouver des solutions concrètes à tout cela dans un cadre global avec LAAÏCO ».

Faure Gnassingbé a donc parlé ! Ni le Premier ministre, ni le ministre de l’Economie qui a posé la première pierre, ni le ministre des Affaires étrangères qui a assisté à la cérémonie de pose de première pierre n’ont rien dit. Ne nous demandez pas pourquoi c’est à la Directrice des impôts que le chef de l’Etat a donné l’ordre d’aller suspendre les travaux et non au ministre de l’Economie qui avait déclaré devant un public miam-miam qu’« il est l’aube d’une nouvelle ère pour la SIAB, qui est prête à relever ce défi ». Le Togo est vraiment malade de ses dirigeants. Pendant ce temps, dame rouille fait ses ravages sur le chantier situé non loin de la mer. Affaire à suivre.

R. Kédjagni

Liberté Togo

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