Hier seulement le journal LIBERTE titrait dans sa parution N°1452 à la page 4 : « Des suites du décès d’Etienne Yakanou : Et si la mort du militant de l’ANC était un test de réactivité de l’opposition toute entière ? » pendant qu’un confrère renchérissait par « Les opposants Jean Eklou, Alphonse Kpogo, Athiley Appolinaire entre la vie et la mort ». Vingt- quatre heures plus tard, nous apprenons que c’est au tour de Loum Mohamed alias Toussaint Tomety de voir son état de santé défaillir. Le peuple togolais va-t-il aussi assister à la mort de ce témoin crucial qui a cité des capitaines de la Gendarmerie nationale dans les traitements inhumains et dégradants qu’il a subis?
Lorsque Mohamed Loum déclamait devant les écrans de télévision les vers que les capitaines Akakpo, Agbenda et autres Yanani lui ont appris, à savoir charger les cadors du Collectif « Sauvons le Togo », à aucun moment il n’a souffert de quelque maladie que ce soit. Et pourtant il était un prévenu entre les mains des forces de l’ordre du Togo dès mi-janvier 2013. Mais depuis que le « prévenu spécial » s’est rétracté et a chargé des officiers de l’armée de l’avoir obligé à inculper des membres du CST, cela ne fait pas encore deux mois. Mais nous apprenons que depuis lundi Mohamed Loum alias Toussaint Tomety a des ennuis de santé. Mais pour qui connaît la prison civile de Lomé et son prolongement qu’est le cabanon au sein du CHU Tokoin, ce prisonnier crucial par qui des officiers de l’armée togolaise risquent de se retrouver derrière les barreaux si un procès devrait se tenir plus tard, a de TRES FORTES CHANCES DE … AUSSI si des dispositions ne sont pas prises. Mme Ige Olatokunbo, représentante résidente du HCDH au Togo a le devoir moral de s’investir comme elle a semblé le faire il y a quelque temps dans ce dossier afin que la vie de Mohamed Loum soit préservée par-dessus tout. La vérité dans l’affaire des incendies et le rôle joué par des officiers dans les enquêtes sont à ce prix.
A l’allure où la santé des prévenus – pas des détenus – est mise en péril, il y a de fortes probabilités que le Togo assiste à son assignation en justice par des partis politiques. Car après Etienne Yakanou, mort le vendredi dernier et avant Mohamed Loum actuellement très mal en point, ce sont Jean Eklou, président de la jeunesse ANC, Alphonse Kpogo, secrétaire général de l’ADDI, Athiley Appolinaire, garde rapproché et chauffeur de Jean-Pierre Fabre, Ouro-Akpo Tchagnao, député et le codétenu d’Etienne Yakanou, qui sont en train de lutter contre la mort. Lutter contre la mort pour pouvoir dire les tortures, les mauvais traitements que des éléments du SRI leur ont fait subir, pour dire si oui ou non des gendarmes leur ont demandé de charger leurs leaders. Mais survivront-ils là où ils sont, toujours entre les mains de leurs geôliers ? Comme hier, nous pensons que seul l’investissement des organisations de défense des droits de l’Homme et des diplomates accrédités au Togo pourra préserver leur vie.
Parlant des déclarations du procureur de la République, il est utile de rappeler que celui-ci a déclaré qu’Etienne Yakanou est mort par arrêt cardiaque. Et d’après les déclarations de la veuve, l’ordonnance est de 2.175 FCFA. Ce qui veut dire qu’il n’y a pas eu d’analyses préalables pour déterminer si oui ou non Etienne Yakanou est diabétique. Ainsi, en considérant que ce soit un sérum glucosé et non salé qui ait été placé au prévenu, des crises consécutives à la perfusion sont certaines, seul une autopsie impartiale pourra situer les membres de son parti politique.
En plus de la veille des ODDH, il urge que le rapport des experts français soit publié. De manière à confirmer ou infirmer l’utilisation exclusive du kérosène comme matière inflammable dans les départs de feu.
Mais le silence qui continue d’entourer la publication du rapport d’une part, plus d’un mois après sa remise aux autorités togolaises et le peu de souci que la France et sa représentation semblent accorder tant au rapport qu’au sort des prévenus dans cette affaire d’autre part risquent de faire penser à des accords secrets qui condamneraient les prévenus. Il suffit de faire une petite comparaison entre le Tchad et le Togo. Après qu’Idris Déby Itno a envoyé des éléments de sa garde rapprochée au Mali pour plaire à la France, il semble avoir des coudées franches pour museler encore plus son peuple. Au Togo, Faure Gnassingbé fut l’un des tout premiers à envoyer un contingent au Mali alors qu’en interne des remous sociaux persistent. De là à penser que contre l’envoi de troupes, le fils du père serait seul à gérer cette affaire d’incendies, il n’y a qu’un pas que l’être pensant a vite fait de franchir. Autrement que coûte-t-il à Laurent Fabius de publier le rapport si tant est que l’actuel gouvernement français a à cœur les souffrances du peuple togolais ?
Abbé Faria
Liberté Togo
