Le défilé et l’allégeance forcée des « putschistes »
 
Le vendredi 23 septembre dernier marquait une page sombre, ou volontairement assombrie par le clan Gnassingbé de l’Histoire de notre pays. C’était le 25e anniversaire de l’agression terroriste dont a été victime le Togo, de la part, nous dit la version officielle, d’un « terroriste international » nommé Gilchrist Olympio, aujourd’hui en parfaites noces avec l’héritier du bourreau de son père. Mais selon des analystes, la célébration de cette année n’est pas sans rapport avec le contexte lugubre engendré par les révélations de complots parallèles de coups d’Etat ayant éclaboussé des « seigneurs » de l’armée au cours du procès de la honte au Togo.
 
Bref rappel de l’histoire
 
Selon la version officielle, le 23 septembre 1986, Lomé a été attaquée par des hommes armés venus du Ghana, à l’époque sous le Capitaine d’aviation John Jerry Rawlings, et c’était grâce à la vaillance (sic) de feu Gnassingbé Eyadéma et de l’armée que le pire a été évité. Le jeudi 25 septembre 1986, le quotidien national «La Nouvelle Marche», aujourd’hui « Togo-Presse » annonçait en manchette un «Complot terroriste déjoué à Lomé», et on y voit feu Eyadema montrer les armes récupérées sur les assaillants aux différentes délégations qui s’étaient précipitées à Lomé. «Ces terroristes ont tué six personnes parmi la population civile. Grâce à la rapidité d’intervention de nos forces de sécurité, sept terroristes ont été tués, dix-neuf autres arrêtés dont deux par les militants de la cellule 30, quartier Saint Joseph», avait rapporté le journal.
 
Trois jours après «l’attentat terroriste», le très zélé ministre de l’Intérieur à l’époque, feu Kpotivi Têvi Djidjogbé Laclé avait organisé une conférence de presse pour éclairer l’opinion. Les terroristes ainsi que les matériels saisis ont été présentés au public, et deux pays voisins étaient mis en cause par Lomé : le Ghana de John Jerry Rawlings et le Burkina Faso de Thomas Sankara. «Le recrutement de ces assaillants s’est effectué sur le territoire ghanéen par les nommés Amah Ayayi dit Sancho, Attisso et El-Hadj Idrissou, tous trois Togolais, résidant au Ghana, à la solde de Gilchrist Olympio et de l’ex-capitaine Francisco Lawson, assistés des sous-officiers de l’armée ghanéenne, tel que le sergent Dobleyou», avait déclaré feu Laclé. Après avoir abordé la formation, les préparatifs des terroristes et leurs plans, le ministre de l’Intérieur s’était interrogé : «Mais, qui sont derrière ces événements de déstabilisation du régime togolais en recourant au terrorisme, en armant des mains criminelles en vue de l’assassinat du président togolais, le général Gnassingbé Eyadema? ».
 
Selon les déclarations des assaillants, le principal n’est autre que…Gilchrist Olympio. C’est ainsi que l’homme est devenu le « most wanted » du Togo, jusqu’à l’amnistie de 1991 au début de l’avènement démocratique qui a permis au fils de Sylvanus Olympio de revenir au pays assister à la Conférence nationale souveraine. Mais n’empêche, Gilchrist Olympio a été, jusqu’à son « mariage » avec Faure Gnassingbé, traité de « terroriste international » et de tous les autres noms d’oiseau. Au nom de cette union du siècle au Togo, le commun des Togolais s’attendait à voir l’« Opposant historique » frelaté majeur confirmer la réconciliation armée-nation ou armée-Olympio commencée avec sa participation aux fameuses « Journées portes ouvertes sur les Fat » récupérée politiquement par le pouvoir en place, en assistant aux manifestations officielles et surtout au défilé militaire. Mais il était introuvable sur les lieux.
 
Le défilé des « putschistes » potentiels
 
Depuis quelque temps, au nom de la réconciliation de façade, l’événement est célébré sobrement. Le 23 septembre est devenu une fête des militaires et se célébrait en vase clos. En 2009 par exemple, l’événement s’est réduit à sa portion congrue. Il a été juste marqué par un dépôt de gerbes au monument aux morts sur toute l’étendue du territoire national. A Lomé, c’est le ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales, porte-parole du gouvernement, Pascal Akoussoulélou Bodjona, qui a procédé à la place du 23 septembre sur le site de Lomé II. Ce dépôt de gerbes a été suivi de la sonnerie aux morts ; la cérémonie s’est déroulée en présence des membres du gouvernement, des députés et des autorités militaires, administratives et traditionnelles, et l’ambiance était entretenue par le groupe des femmes FAT de Lomé. C’était tout.
 
Mais l’année suivante on a renoué avec le défilé militaire, même si c’était en vase clos au Camp Gnassingbé Eyadéma. Nous l’avions dit à l’époque, c’était l’effet de la pression de certains dignitaires galonnés nostalgiques du passé qui seraient contre cette célébration archi sobre. Cette année 2011, il y a encore eu dépôt de gerbe, prise d’arme, défilé militaire et banquet. Sans oublier les décorations. Une célébration loin d’être gratuite, selon des analystes.
 
Les téléspectateurs ont vu les dignitaires des forces armées et de sécurité marquer le pas sur la voie principale du Camp Gnassingbé Eyadéma et décerner un salut sec à Faure Gnassingbé, arrivés à son niveau. Le Général Atcha Titikpina et compères cités comme préparant des complots de coups d’Etat parallèles ont mis assez de sérieux dans cette manifestation, ce qui n’a pas échappé aux yeux des observateurs avisés. Ils étaient aux premières loges. Titikpina avait dirigé la cérémonie de dépôt de gerbe. Le Lieutenant Colonel Felix Kadanga était à la tête des éléments motorisés. « Le défilé de cette année est un message destiné à simuler une certaine unicité de l’armée, à faire croire que tous les chefs corps sont dévoués au chef suprême des armées, et ainsi clouer le bec aux détracteurs. C’est la lecture qu’il faut aussi faire du débarquement du quatuor d’officiers à la Cvjr pour présenter un certain démenti des forces armées et de sécurité sur les événements de la lagune de Bè et l’attaque de la Primature en 1991, pas autre chose », fait remarquer un leader d’opinion.
 
« On a beau simuler la sérénité de l’armée et son allégeance à Faure Gnassingbé, les putschistes présumés ont beau défiler et lui vouer allégeance, cela ne signifie pas grand-chose. D’ailleurs l’histoire du monde nous apprend que le putschiste a très souvent été dans le cercle fermé de sa victime. Il peut lui lécher les bottes, mais l’instant d’une seconde après, retourner l’arme contre son « Dieu ». L’exemple de Toumba Diakité et de Dadis Camara et celui de Laurent Désiré Kabila et son aide de camp sont assez illustratifs. La psychose créée par les révélations de coups d’Etat parallèles ne va pas disparaître de si tôt, quoi qu’on fasse », renchérit un autre observateur.
 
Tino Kossi
 
source : groupe liberté hebdo togo
 

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