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De l’intérêt sélectif du pouvoir à la diaspora togolaise
 
S’il y a une catégorie de Togolais qui sont activement dragués en ce moment par le pouvoir Faure Gnassingbé, ce sont bien les compatriotes de la diaspora. Malgré leurs contributions (financières) déjà énormes, il leur en est davantage demandé. Mais a contrario, la problématique de leur droit de vote est toujours occultée.
 
Assises de la diaspora Afrique à Lomé…
 
Après les rencontres du 8 mars dernier organisées en France pour les Togolais de la diaspora Zone Europe et celles du 15 mars 2014 tenues à Montréal pour ceux de la Zone Amérique du Nord, c’est le tour des concitoyens vivant dans les pays d’Afrique d’être regroupés à Lomé. C’étaient les 27 et 28 mars derniers à Lomé. Il s’agit de les mobiliser et solliciter leurs contributions (financières surtout) à la construction du pays.
 
« Il est important que cette population aussi dynamique participe exactement à l’œuvre de reconstruction que nous avons engagée, à l’œuvre de réconciliation. Nous avons à l’idée que la diaspora joue entièrement son rôle, qu’elle porte sa part. Il n’y a pas de Togolais de l’extérieur ni de l’intérieur et d’autres Togolais qui participent à la construction de leur pays, voilà l’objectif que nous avons », a déclaré le Premier ministre Arthème Ahoomey-Zunu pour les draguer.
 
Opportunités d’emploi, d’investissement et de marché au Togo; mesures incitatives fiscales et douanières à accorder à la diaspora en matière d’investissements privé et social au Togo; problématique du retour/visite au pays de la diaspora à savoir des formalités aux ports d’entrée du Togo; structures de gestion de la diaspora togolaise : les faitières d’associations diasporiques, l’Agence nationale des Togolais de l’extérieur (Ante), et le Fonds d’investissement des Togolais de l’extérieur etc., ce sont là des thématiques qui ont été discutées.
 
« Chers compatriotes, en référence de notre hymne national, Togolais viens, bâtissons la cité, nous avons dit, diaspora togolaise, viens, bâtissons la cité », a lancé aux participants Kossi Gbekobu, le Coordonateur de l’Unité de gestion du programme Diaspora.
 
…Sur fond d’exclusion des compatriotes des pays voisins
 
Les assises de Lomé, selon les organisateurs, sont destinées à rassembler les compatriotes vivant dans les pays de la Zone Afrique. Et à en croire les statistiques, ils constitueraient les 2/3 des Togolais de l’étranger. Il va de soi qu’il soit organisé une pareille rencontre à leur intention. Mais il y a un air d’exclusion et/ou de manipulation dans cette affaire.
 
Les participants à cette rencontre des 27 et 28 mars derniers à Lomé – reste encore à savoir si ce sont de vrais compatriotes de la diaspora et non des gens conditionnés pour venir remplir la salle – seraient de quatre cents (400) personnes, venues du Tchad, du Sénégal, du Mali, du Niger, de la République Centrafricaine, de la Libye, de la République Démocratique du Congo, du Congo Brazzaville dont on estime l’effectif à environ 200 personnes. On l’aura donc constaté, il manque à l’appel les compatriotes des pays frontaliers du Togo : le Ghana, le Bénin, le Burkina Faso. De nombreuses voix parlent d’une exclusion en règle. En tout cas, ils sont nombreux, les compatriotes à se sentir indésirables et fulminer de colère sur la toile. Et pourtant, c’est un secret de Polichinelle que les pays voisins immédiats du Togo enregistrent les plus forts taux de Togolais de la diaspora Afrique. « Félicitations !!! Pourquoi la diaspora au Ghana, au Bénin, au Burkina, en Côte d’Ivoire et au Nigeria n’est-elle pas invitée? Je ne pense pas qu’il y aurait plus de Togolais en Europe et en Amérique puis dans les pays africains choisis et participant à la réunion que dans ces pays oubliés. Au Ghana à Accra, il y a au moins 2 écoles de 2ème et 3ème degrés qui suivent le programme de l’enseignement du Togo et les élèves y composent pour le BEPC et passent les examens du BAC au Togo. Juste pour vous donner une idée de la population togolaise au Ghana seul. Si l’on faisait l’inventaire des ressortissants togolais dans les pays oubliés, on s’apercevra que leur nombre dépasserait de plusieurs fois le nombre dans tous les pays invités. Est-ce à dire que la capacité requise pour participer au développement du pays Togo les ressortissants dans ces pays oubliés est négligeable ? Si c’est cela, je mets tout le monde au défi. Faites un sondage et vous verrez que la plupart des constructions au pays par la diaspora sont l’œuvre de la diaspora au Ghana, Bénin, Burkina, Côte d’Ivoire, Nigeria etc…. D’ailleurs, il suffit de noter que les rapports commerciaux des secteurs informels et même formels à certains égards sont plus denses entre le Togo et le Ghana, le Nigeria et la Côte d’Ivoire. Voyez combien de ces commerçants qui achètent à partir de ces pays pour les marches du pays », a pesté l’un des compatriotes de ces pays exclus.
 
187 milliards transférés en 2013…des craintes légitimes
 
187 milliards de FCFA. C’est le montant des transferts de fonds effectués par les compatriotes de la diaspora au Togo en 2013, d’après les statistiques rendues publiques par la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bcéao). Des transferts qui représenteraient environ 10 % du PIB du Togo, a dardé le Premier ministre. A en croire la Bcéao, ces envois de fonds ont rapporté en moyenne plus de 15 milliards FCFA en termes de recettes fiscales au Togo. Au cours des cinq dernières années, le montant global des transferts serait 3 à 6 fois supérieur aux appuis budgétaires que les partenaires techniques et financiers ont accordés au Togo sur la même période.
 
C’est fort de ces constats que le gouvernement togolais a mis en place un programme de gestion de la diaspora togolaise pour les appâter davantage. C’est un clin d’œil actif aux compatriotes de la diaspora à transférer davantage de fonds et à venir investir dans des projets porteurs au Togo ; et pour camoufler la chose, on parle de compétences, de contribution à la construction de l’édifice national. Qu’à cela ne tienne, il n’y a à priori aucun mal pour le pouvoir à demander davantage aux Togolais de la diaspora. Ce sont simplement leurs proches et les populations en général qui se porteraient mieux si ces concitoyens transféraient plus de fonds. Mais la question est de savoir s’il leur sera réservé l’accueil voulu s’ils consentent revenir au pays et investir dans des secteurs. « (…) Pensent-ils que nous ne sommes pas au courant des aventures malheureuses de certains de nos camarades qui ont essayé de revenir s’installer au pays ? Si un Togolais de la diaspora débarque au Togo et veut ouvrir sa station d’essence, vont-ils lui accorder la licence? Si un autre veut ouvrir son bureau de publicité commerciale, vont-ils le laisser faire? Si un autre veut ouvrir un réseau de transport avec des bus, vont-ils l’accepter ? », a fulminé un compatriote de la diaspora sur la toile. Des craintes somme toute justifiées, lorsqu’on se rappelle la mésaventure du compatriote de la diaspora venu avec le projet de taxi-pub débuté un moment, mais qui s’est vu déposséder de son idée récupérée par la suite par une société de la place à son profit.
 
Le droit de vote toujours passé par pertes et profits
 
Ce sont de belles intentions qui ont à nouveau été déclamées à l’occasion de ces assises. Il a été ressassé que le programme diaspora vise à permettre aux compatriotes de l’extérieur de participer à la construction du pays, à l’œuvre de réconciliation, de développement, bref de jouer leur part malgré la distance. Avant de demander ces faveurs (sic) à la diaspora, ne faut-il pas lui permettre de jouir d’un de ses droits fondamentaux, celui de participer au choix des dirigeants de son pays natal ?
 
C’est la mode aujourd’hui, presque tous les pays permettent à leurs ressortissants vivant à l’étranger d’exercer leur droit de vote. Ainsi ces citoyens votent dans les ambassades et autres représentations diplomatiques à l’étranger. Mais ce n’est pas le cas du Togo. Le Père a toujours considéré, à tort ou à raison, ces compatriotes comme des opposants, et leur accorder le droit de vote, c’est comme booster l’électorat de l’opposition. Et cette mentalité semble reprise à son compte par le Fils. Ils seraient plus de deux millions (2 000 000) de compatriotes, soit le tiers de la population totale, à vivre hors des frontières. Et tout ce beau monde est écarté du choix des dirigeants du Togo. La problématique n’a jamais été prise en compte depuis l’enclenchement de la drague de la diaspora et est toujours passée par pertes et profits. Ce qui donne l’air d’une escroquerie morale de la part du pouvoir qui quémande les fonds de la diaspora, mais refuse toujours de lui concéder le droit de vote.
 
Tino Kossi
 
Liberté Togo
 

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