La transition démocratique est en cours…

 
Les Tunisiens ont commencé à voter dimanche dans l’émotion pour élire une assemblée constituante, premier scrutin libre de leur histoire dont les islamistes d’Ennahda sont les grands favoris, neuf mois après la révolution qui a chassé Ben Ali et donné le coup d’envoi du printemps arabe.
 
«La Tunisie offre aujourd’hui au monde entier un bouquet de fleurs, de liberté et de dignité», a dit à l’AFP Houcine Khlifi, 62 ans, le premier à voter dans un bureau du centre de Tunis, qui a ouvert comme prévu à 07H00 (06H00 GMT). «C’est fait! On rompt avec le passé et on revit», a-t-il ajouté, les larmes aux yeux.
 
Dans le centre-ville comme dans toutes les banlieues, des centaines de personnes se pressaient devant les centres de vote, impatients mais disciplinés. A Ben Arous, en banlieue sud, l’ouverture des bureaux a été accueillie par les you-you de joie des femmes.
 
«Je crois que quelque chose se passe. Les gens ne se laisseront plus jamais faire», dit Amel, 48 ans, qui «ne fait pas de politique» mais est «heureuse de voir autant de gens se mobiliser».
 
Crucial pour les Tunisiens, l’enjeu l’est aussi pour le printemps arabe: sa réussite ou son échec enverront un signal déterminant aux peuples qui se sont soulevés dans la foulée de la révolution tunisienne.
 
Coïncidence du calendrier: la Tunisie se rend aux urnes le jour même où son voisin libyen doit proclamer sa «libération totale», trois jours après la mort de Mouammar Kadhafi.
 
Dans le quartier résidentiel d’El Menzah, où le chef du grand parti islamiste Ennahda va voter, l’ambiance était à la fois bon enfant et électrique.
 
Rached Ghannouchi est arrivé en famille et a commencé à se diriger vers l’entrée du bureau, avant d’être rappelé à l’ordre par la foule: «La queue! la queue! La démocratie commence par là!». Souriant, il a alors pris sa place dans la file d’attente, à plus d’un kilomètre de l’entrée du bureau de vote.
 
«Cette affluence démontre la soif du peuple pour la démocratie», a-t-il déclaré, assailli par des dizaines de journalistes.
 
Le Premier ministre Béji Caïd Essebsi a voté à La Soukra (nord de Tunis). Très applaudi, il a dit qu’il n’était en ce jour historique «qu’un citoyen comme les autres, parmi les autres».
 
Plus de 7 millions d’électeurs sont appelés à élire les 217 membres d’une assemblée constituante qui devra rédiger une nouvelle constitution et désigner un exécutif, lequel gouvernera jusqu’aux prochaines élections générales.
 
La grande inconnue est le taux de participation au vu de la multiplicité des candidats dans un paysage politique remodelé pour des élections dont, pour la première fois, les résultats ne sont pas connus par avance.
 
Les électeurs doivent départager 11.686 candidats, répartis sur 1.517 listes, présentées par 80 partis et des «indépendants» (40%). Alors que la parité est obligatoire, les femmes ne sont que 7% à mener des listes.
 
Le scrutin est sécurisé par quelque 42.000 militaires et policiers, et scruté par plus de 13.500 observateurs locaux et internationaux.
 
Les Tunisiens vivent leur baptême du feu démocratique. L’acte de voter avait perdu tout son sens sous la présidence autoritaire de Habib Bourguiba, le père de l’indépendance (1956) qui s’en été vite dispensé.
 
Il n’était qu’une formalité sous le règne de son successeur Zine El-Abidine Ben Ali, constamment réélu avec des scores défiant l’imagination (99,91% en 1994).
 
Fait inédit, c’est une instance électorale (Isie) totalement indépendante de l’éxécutif qui a piloté tout le processus électoral, à la place du ministère de l’Intérieur disqualifié par des années de fraude.
 
A Tunis, Kaouther Hamdi, femme au foyer de 33 ans, a salué «une rupture avec une époque noire dans la vie des Tunisiens».
 
Parti du centre déshérité du pays le 17 décembre 2010 après l’immolation d’un jeune vendeur ambulant de Sidi Bouzid, un soulèvement populaire sans précédent avait gagné en un mois tout le pays. Ben Ali a pris la fuite le 14 janvier pour se réfugier en Arabie saoudite.
 
Le vent de liberté de la révolution a profité à Ennahda, durement réprimé sous l’ancien régime et légalisé en mars, qui a rapidement reconstitué ses réseaux.
 
Son chef Rached Ghannouchi a cherché à rassurer. Il s’est réclamé d’un islam modéré proche du parti islamo-conservateur au pouvoir en Turquie AKP, a promis de ne pas toucher au statut de la femme, le plus avancé du monde arabe, et prôné un gouvernement de large union.
 
Incapables de s’entendre pour créer un front anti-islamiste, les grands partis de gauche ont promis une vigilance de tous les instants pour défendre les libertés et le statut de la femme.
 
Le dépouillement commencera dès la fermeture des bureaux de vote à 19H00 et les premiers résultats tomberont dans la nuit. L’Isie annoncera les résultats définitifs lundi après-midi.
 
source : AFP via 20minutes.fr

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