A l’occasion de sa visite au World Economic Forum, le président du Togo, Faure Gnassingbé, nous a livré en exclusivité son point de vue sur la place de l’Afrique dans la gouvernance mondiale et sur les synergies entre nos pays respectifs, en particulier dans le domaine des phosphates.
 
propos recueillis par saad a. tazi
 
Comment qualifiez-vous les relations entre le Togo et le Maroc ?
 
Le Maroc et le Togo ont toujours entretenu d’excellentes relations. J’ai une profonde estime pour Sa Majesté le Roi Mohammed VI dont la haute stature rayonne sur toute l’Afrique. De nouvelles perspectives s’ouvrent pour une coopération renforcée entre nos deux pays.
 
Quelles sont les principales synergies actuelles et potentielles entre nos deux pays ?
 
Nos pays sont tous les deux grands producteurs de phosphates. Nous devrions donc pouvoir coordonner nos efforts afin de mieux gérer les aléas du marché international.
 
Pour la formation de certains de nos cadres, nous nous appuyons beaucoup sur les structures qu’offre le Maroc. C’est le cas dans des domaines essentiels comme l’éducation, la santé, le génie civil, etc. C’est un bel exemple de coopération Sud-Sud.
 
Avec l’Angola (que vous devancez) et le Liberia, le Togo fait partie des pays qui ont connu une progression significative dans le dernier classement de la fondation Mo Ibrahim. Comment interprétez-vous cela ?
 
Ces dernières années, nous avons effectivement consenti beaucoup d’efforts pour l’assainissement de nos finances publiques. Nous avons aussi noué des partenariats avec de grandes écoles de commerce pour développer chez nos jeunes cadres la culture du résultat. Tous ces efforts commencent à payer. Le classement Mo Ibrahim nous encourage simplement à en faire davantage.
 
On parle beaucoup de gouvernance mondiale, quelle est la place de l’Afrique et de votre pays en particulier dans cette nouvelle configuration ?
 
Les pays pris individuellement ne comptent pas beaucoup quand il s’agit de mondialisation. Il vaut mieux aborder cette problématique à l’échelle des grands ensembles économiques. Sous cet angle, l’influence de l’Afrique dans les structures de gouvernance mondiale reste largement en deçà de son potentiel économique et de son poids démographique. Nul ne conteste ce fait. L’Afrique n’a aucun siège au Conseil de sécurité. Il est alors important de promouvoir une meilleure représentation de notre continent dans des instances comme le G20, qui me paraît mieux placé pour refléter la configuration du monde d’aujourd’hui.
 
Quels sont les principaux chantiers en cours actuellement au Togo ?
 
Les chantiers sont nombreux. Tout semble prioritaire. Nous avons réussi à apaiser le climat politique. Nous nous attaquons à présent aux chantiers de la relance économique. La rénovation et le développement des infrastructures sont un passage obligé.
 
Nous mettons tout en œuvre pour renflouer la filière des phosphates et relancer le secteur agricole.
 
L’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA), présidée par vous-même, accomplit un travail remarquable mais qui n’est pas médiatisé au niveau international. Pourriez-vous partager avec nous quelques-unes de ses réalisations ?
 
L’OHADA est un outil très utile pour l’intégration régionale. Nous avons hérité de la colonisation des systèmes juridiques disparates. C’est véritablement un frein pour les échanges commerciaux. Le traité de Port-Louis nous permet de faire de réelles avancées. La mondialisation de l’économie exige l’harmonisation des droits et des pratiques du droit. Cette exigence constitue pour des pays en développement comme les nôtres une nécessité. Il s’agit de créer les conditions favorables à l’instauration d’un espace de sécurité juridique et judiciaire indispensable pour drainer des flux importants d’investissements.
 
Le droit OHADA est une réalité dans 16 pays africains. On gagnerait sans doute beaucoup à l’ouvrir aux pays africains anglophones à travers des mécanismes bien étudiés.
 
Quel bilan faites-vous de l’édition de cette année du World Economic Forum de Marrakech ?
 
Toutes les réunions du Forum économique mondial rassemblent sur un site un nombre inimaginable de décideurs. C’est vraiment très pratique et Marrakech n’a pas fait exception. Je me réjouis que des questions telles que les rapports économiques entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne ont été inscrites à l’ordre du jour. Le Forum gagnera à prendre davantage en compte les préoccupations des pays en développement.
 
En 2011, la quatrième caravane de l’export (délégation d’hommes d’affaires marocains) se rendra au Togo et au Bénin, quel est pour vous le profil type des participants pour faire de ce voyage un succès ?
 
Au-delà des profils techniques, il faut surtout rechercher la disposition aux échanges, au partage et à la solidarité. Il faut vraiment une telle disposition d’esprit pour que chacun des pays impliqués puisse vraiment déployer tout son potentiel pour une coopération mutuellement bénéfique.
 
Sur le plan diplomatique régional, quelle lecture faites-vous du plan d’autonomie proposé par le Maroc pour les provinces sahariennes ?
 
J’ai eu l’occasion d’affirmer à plusieurs reprises que le Togo soutient sans réserve le principe de l’unité du Royaume du Maroc. Dans ce cadre, le plan d’autonomie des provinces sahariennes est une avancée historique pour prendre en considération la diversité des expressions locales tout en respectant l’indispensable souveraineté de l’Etat.
 

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