Nécessité de réhabiliter les personnes qui sont injustement incarcérées
 
Interpellés et incarcérés à Kara dans l’affaire Kpatcha Gnassingbé, les sieurs Awadé Massama-Esso, Capitan Essovou et Blandé Toï, ont recouvré leur liberté en avril 2010. Mais la procédure judiciaire les concernant s’est poursuivie jusqu’au 18 juillet 2011 où le juge d’instruction au tribunal de première instance de deuxième classe de Kara a pris une ordonnance de non-lieu. Il se pose alors la question de la réhabilitation de ces personnes injustement arrêtées.
 
Quelques heures après les fusillades de Pâques dans la nuit du 12 au 13 avril 2009 au domicile de Kpatcha Gnassingbé, les membres du bureau de l’association Action Avenir Kara (2AK) dont le président d’honneur est l’ancien ministre de la Défense, se sont réunis pour se partager l’information. A l’issue de la réunion, Ils ont décidé que si le silence perdurait de la part du gouvernement, ils organiseraient une marche le mercredi 15 avril 2009 pour non seulement apporter leur soutien au député de la Kozah, mais aussi demander que les auteurs de cette attaque soient traduits devant les tribunaux.
 
Mais dans le journal de la mi-journée du 13 avril 2009, le Procureur de la République d’alors, Robert Baoubadi Bakaï, brocardé dans le microcosme médiatique togolais « propriétaire de tous les dossiers » pour son zèle à habiller juridiquement toutes les affaires louches, est monté au créneau pour annoncer aux Togolais que Kpatcha Gnassingbé et un groupe de militaires et de civils préparaient un coup d’Etat et que les fusillades de Pâques avaient pour but de l’appréhender. Résultante, les membres de 2AK se sont retrouvés et ont décidé de surseoir à la manifestation prévue le 15 avril 2009. Comme une procédure judiciaire est enclenchée, il était inopportun de battre le macadam.
 
Invités le 18 avril 2009 par le commandant de groupement de gendarmerie de Kara, les sieurs Awadé Massama-Esso, Capitan Essovou et Blandé Toï ont été, sans autres formes de procès, mis au cachot une fois qu’ils sont arrivés à la brigade territoriale de la gendarmerie. Trois jours plus tard, ils ont été présentés au Procureur de la République près le tribunal de Kara qui les a inculpés à contrecœur – on lui a forcé la main – pour « incitation à la révolte » en visant l’article 233-3 du code pénal qui dispose : « Seront punis de cinq à dix ans de réclusion ceux qui dans un mouvement de révolte, auront provoqué un mouvement par des promesses, menaces, ordres ou signes de ralliement ». Les trois membres de 2AK sont alors déférés à la prison civile de Kara connue pour ses conditions de vie exécrables.
 
Sur insistance des détenus, le dossier fut confié au juge d’instruction d’alors M. Kelouwani (actuellement 3ème juge d’instruction à Lomé) qui, après quelques mois d’instruction, a bouclé le dossier et abouti à la conclusion qu’il n’y avait pas d’infraction. Mais malheureusement, il n’a pas eu le courage de les libérer et l’ordre d’en haut qu’il attendait avant de s’exécuter, n’est jamais arrivé.
 
Nommé en remplacement du juge Kelouwani, M. Humado Koku a repris le dossier et prononcé une 1ère ordonnance de non lieu en date du 18 février 2010. En revanche, le Procureur de la République a fait appel de cette décision en estimant que le juge d’instruction devrait faire une enquête de moralité sur ces personnes avant toute éventuelle clôture du dossier. Le dossier a traîné devant la Cour d’appel de Kara pendant deux mois sans que celui-ci ne soit tranché. Et le 16 avril 2010, le juge d’instruction décide par « main levée de mandat de dépôt » qui équivaut à une liberté provisoire d’office, de les mettre en liberté. Mais ils ont exigé qu’une décision définitive soit prise par rapport à notre dossier soit par leur culpabilisation, soit par leur acquittement. Par bonheur, le juge d’instruction a continué les investigations et a fait les enquêtes de moralité que le procureur lui avait demandées. Ce qui a abouti le 18 juillet 2011 à une ordonnance définitive de non-lieu.
 
« Attendu, que de tout ce qui précède, il ya preuves suffisantes pour dire que l’infraction d’incitation ou de provocation à la révolte n’est pas constituée en l’espèce, de même que la tentative de ladite infraction ne l’est pas, en conséquence, disons n’y avoir lieu à suivre contre les inculpés de ce chef »,dit en substance l’ordonnance de non-lieu.
 
Comme on le voit, les sieurs Awadé Massama-Esso, Capitan Essovou et Blandé Toï ont subi des préjudices certains. Il nous revient qu’ils sont sortis de la prison avec des infections de tous genres qu’ils n’ont pas fini de traiter. Ils méritent d’être réhabilités comme l’exige l’alinéa 4 de l’article 19 de la Constitution togolaise :
 
« Les dommages résultants d’une erreur de justice ou ceux consécutifs à un fonctionnement anormal de l’administration de la justice donnent lieu à une indemnisation à la charge de l’Etat, conformément à la loi ».
 
Par exemple, M. Awadé Massama-Esso était fonctionnaire à l’Université de Kara et préparait d’ailleurs une thèse de doctorat avant qu’il ne soit appréhendé. Il convient qu’avec cette décision de la Justice il soit réintégré et qu’il jouisse des fruits de son travail.
 
R. Kédjagni
 
source: liberté hebdo togo

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