Il avait pendant longtemps cru que son statut de fils de président lui ouvrait automatiquement les portes des privilèges de la nation sénégalaise, qu’il lui ouvrait un boulevard vers la Présidence de la République jusqu’à ce que ne vienne ce terrible 23 juin 2011 où le peuple sénégalais, par des manifestations monstres, le tira de ses rêveries. Enfin Karim Wade a les deux pieds sur terre. Il a fallu cet épisode du 23 juin pour décider le fils d’Abdoulaye Wade à rompre le silence et à situer le peuple sénégalais sur ses réelles « intentions ». L’a-t-il fait de bon coeur ou a-t-il été contraint par les laborantins du Parti démocratique sénégalais (Pds) qui cherchent à sauver le peu de crédit qu’il leur reste encore ? Difficile d’y répondre. « Désormais, il y a un avant et un après 23 juin », a écrit le fils adoubé d’Abdoulaye Wade dans une lettre ouverte au peuple sénégalais dans laquelle il donne l’impression d’avoir enfin compris que le projet de succession monarchique que lui et son père concoctaient pour le Sénégal ne marchera jamais. « Ce message ne peut être ignoré ni par le pouvoir, ni par l’opposition. Notre formation politique, le Parti démocratique sénégalais (Pds), et nos alliés ne peuvent faire autre chose que de consolider les acquis démocratiques de Léopold Sédar Senghor, d’Abdou Diouf et de Abdoulaye Wade », précise-t-il.
 
Dans la correspondance à ses compatriotes, Karim Méissa Wade se présente comme la principale victime de cette affaire. On découvre un Karim Wade respectueux des principes démocratiques, attaché à la dévolution du pouvoir par les urnes et non par le droit de sang et farouche défenseur de la « méritocratie ». A-t-il réellement été exorcisé du démon de la tentation monarchique ? Ils sont nombreux les Sénégalais à ne pas croire en cette éventualité. « Voilà l’archétype d’Africains qui ne font pas honneur à ce continent », fait remarquer N’Diaye, un commerçant sénégalais installé à Lomé. «Où était le fils de Wade lorsque ces rumeurs commençaient à courir les rues de Dakar»?, se demande celui-ci. Il a laissé prospérer cette rumeur, mieux, il l’a alimentée par son omniprésence dans les affaires au sein du gouvernement sénégalais, par l’image de futur président qu’il se donnait à chaque fois qu’il en avait l’occasion, aidé dans cette entreprise par son père.
 
« On me prête beaucoup, fait noter Karim Wade dans sa correspondance. Qu’on perde un marché public, une position, une faveur, un privilège, un titre, une fonction, aussitôt l’on me rend responsable. Qu’un ministre soit limogé, il prétend que son départ est la conséquence immédiate de son refus d’un prétendu projet de dévolution monarchique du pouvoir. Pourtant, rien ne m’a été donné».
 
Mais que non ! Tout a été donné à Karim par son père. Tout ce que ce jeune homme est aujourd’hui, il le doit au plus rasé des présidents d’Afrique. Posons-nous la question : pourquoi un Gueye ou un N’Diaye, qui ont presque les mêmes compétences, voire plus de qualifications que le fils d’Abdoulaye Wade, ne sont pas ministre d’Etat, ministre de la Coopération internationale, ministre des Transports aériens, des Infrastructures et de l’Energie dans le gouvernement sénégalais ? Pourquoi n’ont-ils pas entre leur main, un budget de 370 milliards pour mener à bien un projet gouvernemental ? Enfin, pourquoi Karim Wade ne prend-il pas la mer comme tous ces jeunes Sénégalais désabusés par la gestion de son père, qui vont chercher fortune en Europe en traversant au prix de leur vie, les enclaves de Ceuta et Mélilla ? Qu’a-t-il de plus que le reste de la masse des Sénégalais ? Il a un père président, répondra-t-on. Malheureusement, tous les jeunes de ce pays n’ont pas la même chance que Karim.
 
« Je le répète et le répéterai aussi longtemps que cela est nécessaire: c’est une insulte faite aux Sénégalais que de parler d’un projet de dévolution monarchique. Un tel projet n’a été, n’est et ne sera jamais dans les intentions du président de la République ni dans les miennes », a poursuivi dans son courrier, le « ministre de la terre, des airs et de la mer », comme se plaisent à l’appeler les Sénégalais pour mettre en exergue son côté fils à Papa.
 
Au lieu de soutenir que ni le président Abdoulaye Wade, ni lui n’ont jamais voulu transmettre le pouvoir de façon héréditaire, ( ce qui crevait les yeux), l’honnêteté intellectuelle aurait voulu que Karim Wade reconnaisse avoir été tenté par cette entreprise, mais qu’il a fini par comprendre que c’était une mauvaise idée. A-t-il déjà oublié Deauville où son père, aidé de Nicolas Sarkozy, avait mis en place une opération de séduction baptisée : « poignée de main avec Obama» afin de le faire entrer dans les bonnes grâces de la Maison Blanche ? Et le projet de révision constitutionnelle annihilé par le peuple sénégalais ? A qui devait-il le plus profiter ?
 
Il se raconte même qu’il avait le pouvoir de « boulonner » et de « déboulonner », au gré de ses humeurs, les ministres du gouvernement. Samuel Sarr, Idrissa Seck, Macky Sall et tant d’autres cadres, qui ont eu à se frotter à lui, en savent quelque chose.
 
On est bien tenté de croire en la bonne foi du super ministre sénégalais. Prions que cela dure et que les démons de la création d’une « République monarchique du Sénégal » ne reviennent hanter l’esprit purifié de Karim.
 
Olivier A.
 
source: liberté bebdo togo

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