Yotroféï Massina, Atcha Titikpina, Capitaine Akakpo…Ce sont là les personnes qui incarnaient la répression des manifestations du Collectif « Sauvons le Togo ». C’est cette logique répressive couplée de l’immixtion des deux premiers dans ses prérogatives qui ont poussé Gilbert Fossoun Houngbo à rendre le tablier. On pensait que ces événements ne seraient que de lointains souvenirs et qu’avec le nouveau Premier ministre, le pouvoir voudra redorer son blason et la jouissance des libertés de manifestations publiques et d’expression offertes par la Constitution serait effective. Mais les incidents de Kara le samedi 4 août dernier viennent démentir ces espoirs.
 
Une ère de dialogue, de paix et de respect des libertés annoncée
 
Au plus fort de la polémique sur les raisons de la démission surprise de Gilbert Houngbo et de son gouvernement, les services d’Information et de Communication de la Présidence de la République et de la Primature avaient cru devoir monter au créneau pour rappeler qu’elle se situe « exclusivement…dans un souci d’ouverture et de cohésion nationale » visant à associer à la gestion des affaires publiques, « l’ensemble des forces vives et des courants représentant la classe politique togolaise ».
 
La feuille de route assignée à son successeur chante l’apaisement. « L’approfondissement du dialogue démocratique », ainsi est intitulé le premier pilier où il est indiqué que « les droits de l’opposition doivent être respectés, l’administration doit être impartiale, la justice doit être respectée ainsi que les règles de l’Etat de droit ». Arthème Ahoomey-Zunu même en a rajouté jeudi dernier lors de la soumission de son programme de gouvernement à l’appréciation des députés. « Le dialogue politique doit, sans attendre, reprendre toute sa place au sein de la société togolaise. Il doit concerner tous les courants politiques et l’ensemble des forces vives de la nation. A cet effet, le Gouvernement accordera un degré de priorité élevé à la relance du dialogue et des concertations politiques dans le but de traduire dans les faits, le souci d’ouverture et de cohésion nationale constamment exprimé par le Chef de l’Etat. Ce souci d’ouverture politique, maintes fois réaffirmé, puise son fondement dans la volonté d’associer tous les Togolais qui le souhaitent à la gestion des affaires publiques ainsi qu’à la poursuite des réformes nécessaires pour l’approfondissement de la démocratie et pour l’enracinement de l’Etat de droit au Togo », a-t-il déclaré.
 
Toutes ces sorties annonçaient un paradis des droits de l’Homme au Togo sous l’ère Ahoomey-Zunu, le respect total des droits de l’opposition, ce qui s’entend des libertés politiques et publiques de manifestations et d’expression. Mais les actes sont aux antipodes de ces professions de foi.
 
Des miliciens pour empêcher le meeting du CST
 
Jusqu’au 4 août dernier, la pratique consistait à déployer des agents des forces de l’ordre bien identifiables, et parfois des militaires habillés en uniforme de policiers ou de gendarmes, pour réprimer les manifestations non interdites du Collectif « Sauvons le Togo ». Mais elle semble avoir changé. En lieu et place des corps habillés, le pouvoir recourt désormais à ses milices pour intimider et violenter au besoin. La nouvelle stratégie vient d’être inaugurée à Kara le samedi 4 août dernier.
 
« Malgré le respect des formalités administratives en la matière, des bérets rouges furent déployés sur le terrain. Et ce n’est qu’à la suite de moult tractations qu’ils ont dû replier, remplacés quelques minutes plus tard par un renfort de miliciens munis de cordelettes, des machettes et des gourdins. Ces derniers ont proféré des menaces à l’endroit des responsables du collectif qu’ils ont sommés de quitter rapidement les lieux sous peine de subir des actes de violence car Kara n’a pas besoin de sauveurs. Selon les propos, la ville ayant été déjà sauvée par Faure GNASSINGBE, le CST n’a qu’à aller offrir ses prestations dans d’autres préfectures du Togo. Plus grave, un véhicule de couleur blanche de marque BMW immatriculé TG 4239 AD appartenant à monsieur Romy Badanaro- Essom, beau-frère d’Ernest Gnassingbé, était positionné sur les abords du lieu du meeting, rempli de gourdins et de machettes. Face à l’agressivité des miliciens qui voulaient en découdre avec les membres du CST et la foule des militants qui ont fait le déplacement du meeting malgré les intimidations et surtout l’indifférence complice et coupable des forces de sécurité qui n’ont daigné intervenir, la délégation du CST a quitté le lieu du meeting », rapporte le Collectif dans une déclaration datée du mardi 7 août.
 
Il faut le souligner, tout s’est fait au vu et au su des forces de l’ordre restées impassibles devant ces agissements des miliciens. Logiquement, puisque les miliciens ont été bien organisés par le sommet de l’Etat et des billets de banque leur ont été distribués pour ce faire. Au centre de la manœuvre, Faure Gnassingbé himself. Tout cela, dans un pays qui se veut démocratique et de droit !
 
Ils étaient nombreux, les Togolais à prédire un échec à Arthème Ahoomey-Zunu à la Primature, au vu de son profil. En tout cas les Togolais ne le voyaient pas faire mieux que son prédécesseur Gilbert Fossoun Houngbo. « Ne Houan gbo adéee, Ahoomey yé lazounoudéa ? » (Si Houngbo a échoué, est-ce Ahoomey qui va réussir ?). C’est le morceau improvisé par les artistes du Collectif « Y-en-a marre, Etiamé », jouant sur leurs noms, lors du concert du vendredi 27 juillet dernier sur l’esplanade du Palais des congrès de Lomé. Une chanson qui exprimait à merveille le pessimisme des populations quant à sa réussite. Et les faits n’ont pas tardé à leur donner raison. Il faut même craindre que le recours aux miliciens pour faire le sale boulot à la place des corps habillés et ainsi les désengager de la responsabilité des répressions et autres violences sur les manifestants du CST ne devienne la norme sous Ahoomey-Zunu, qui fait partie de la ligne dure autour de Faure Gnassingbé.
 
Tino Kossi
 
 
liberte-togo.com
 

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