Comme tous les samedis, les militants et sympathisants du Front républicain pour l’alternance et le changement (Frac) étaient encore ce 1er septembre dans les rues de Lomé. Mais ils l’étaient avec leurs camarades du Collectif « Sauvons le Togo ». Le cortège s’est ébranlé d’Akodesséwa, a marché dans les rues de Lomé pour finalement chuter à la plage du côté de l’Hôtel de la Paix où a eu lieu un meeting. Mais les rues de la capitale, les partisans du Frac et du Cst ont dû les partager ce samedi avec d’autres manifestants : de pseudos supporters de Faure Gnassingbé.
 
En effet ils étaient nombreux, de jeunes désœuvrés pour la plupart, à prendre d’assaut la Place de la Colombe de la Paix, à l’appel du Collectif des jeunes de l’Union pour la République et d’une pléthore d’associations qui n’ont d’yeux que pour le Prince de la République, pour le soutenir. De blanc vêtus, la cohorte de sympathisants (sic) a marché sur des kilomètres avant de rejoindre l’esplanade du Palais des Congrès de Lomé, le point de chute où ils ont été entretenus par les organisateurs. Ils entendaient ainsi « soutenir la politique du Président Faure Gnassingbé », lui « marquer leur adhésion à sa politique de paix et de développement ».
 
Manifestation anti-CST
 
La veille sur les ondes, les organisateurs parmi lesquels Joseph Amégah de la Nouvelle jeunesse pour le soutien de Faure Gnassingbé (Njsf) et de la TVT, ont mis leurs dix doigts au feu et nié vouloir marcher pour répondre au Cst. A les en croire, il s’agit plutôt de « soutenir la politique du Président Faure Gnassingbé ». Mais leurs interventions sur l’esplanade du Palais des congrès les ont trahis. C’est le Cst et ses responsables qui en ont eu pour leur grade. Ils ont été passés à la tronçonneuse. Mlle Hounkpati Amélé, présidente des Femmes unies pour le développement, Agbélessessi Koffi, présenté comme le porte-parole de la « Majorité Silencieuse » et Joseph Amégan de la Njsf, ont respectivement dénoncé l’initiative de la marche des femmes nues, les manifestations en général du Cst et les pseudos violences des militants et sympathisants de ce collectif. « Le monopole des manifestations n’appartient pas à l’opposition et quand les partisans du pouvoir descendent dans la rue, c’est un cortège bien plus imposant et plus souriant que celui du CST et de ses affiliés », s’est extasié republicoftogo. C’est le contraire qui aurait étonné.
 

Clochardisation de la jeunesse togolaise

 
Les marcheurs sont présentés comme des jeunes de l’Unir, qui ont tenu à réaffirmer leur soutien à la politique de Faure Gnassingbé. Mais Dieu sait la proportion de la jeunesse vraiment militante dans cette masse. Il est permis de voir en cette mobilisation du pipo, quand on sait que c’était le silence plat du côté du siège de l’Unir à Lomégan malgré les appels à grand renfort médiatique lancés à l’endroit de la population à aller s’inscrire. La plupart des marcheurs, des jeunes, n’étaient là que pour de l’argent. 2000 FCFA, c’est ce qu’ils ont eu ce samedi. C’est un secret de Polichinelle, les marcheurs du pouvoir ont toujours été intéressés (sic). Les jours précédant la manifestation, c’est une véritable campagne de séduction qui a été entreprise à leur endroit. Ils étaient presque harcelés par des gens qui faisaient du porte-à-porte avec les tricots blancs et procédaient au « recrutement » des potentiels marcheurs. Il faut avouer que la mayonnaise a pris chez les jeunes (inconscients), avides d’argent.
 

Marche de soutien à Faure Gnassingbé: Import-Export de manifestants [01/09/2012]

 
« Marcher juste de la Colombe au Palais des Congrès et prendre 2000 FCFA, je n’ai rien à y perdre. D’ailleurs, moi je marche d’habitude…Je serai le premier présent si on remettait cela sur le samedi prochain », confie Vincent, l’un de ces jeunes élèves marcheurs qui nous a même dit ce qu’il compte faire de cet argent : se rendre dimanche au lieu dit Abattoir au Grand marché pour s’offrir quelques friperies. Quant à savoir s’il soutient vraiment la politique de Faure Gnassingbé, comme le prétextent les organisateurs, il nous a gratifié d’un sourire sarcastique qui dit tout, retroussé son pantalon trois quart genre Cool Catché et nous a quitté.
 
Comme il fallait s’y attendre, la stratégie de l’import-export était encore au rendez-vous. Ainsi de toute la matinée de ce samedi, c’est à des allers retours incessants de bus entre Lomé et les localités avoisinantes qu’on a assisté, pour convoyer les marcheurs sur les lieux. C’était le même ballet au terme de la manifestation. Parfois les bus étaient tellement bondés que d’autres marcheurs étaient obligés de se jucher sur les toits de ces véhicules, avec tous les risques que cela comporte. Tout cela, pour 2000 FCFA.
 
A l’exception (peut-être) des organisateurs et membres des associations de soutien à Faure Gnassingbé – ici aussi c’est relatif -, cette masse de personnes n’était pas là pour le soutenir vraiment, mais simplement pour de l’argent. Et combien encore ? De pauvres billets de 2000 FCFA. Les organisateurs eux-mêmes savent bien que s’ils ne cassaient pas la tirelire, ils se retrouveraient à la Colombe et au Palais des Congrès tout seuls. Mais il faut avouer que c’est toujours la sempiternelle clochardisation des populations togolaises et surtout de la jeunesse qui a encore cours. Si non comment comprendre que dans cette atmosphère sociopolitique lugubre engendrée par l’obscurantisme du pouvoir, l’injustice flagrante dont sont victimes Agba Bertin et Pascal Bodjona, la hausse récente du gaz butane etc., il se trouve encore des gens à « soutenir la politique de paix et de développement de Faure Gnassingbé » ? C’est le cas des jeunes élèves qui est beaucoup plus pitoyable. D’autant plus que selon les indiscrétions, les frais de scolarité seront augmentés dans les écoles privées et confessionnelles à la rentrée prochaine, et ce sont leurs parents qui trimeront pour les envoyer à l’école. En attendant, leurs enfants trouvent que Faure Gnassingbé fait bien.
 
La clochardisation des populations est une arme fatale du clan Gnassingbé. Les prix des produits de première nécessité et des services sont augmentés de façon intempestive et on maintient le peuple dans la misère afin de l’exploiter à l’approche des échéances électorales. Les gouvernants sachant qu’en les maintenant dans la dèche, les populations accourront comme des chiens de pavlov, au moindre clic des doigts.
 
Le soutien, la preuve d’un régime aux abois
 
Cette marche s’inscrit dans la même logique que la campagne de séduction enclenchée par le pouvoir et qui consiste à envoyer dans des pays de la sous-région les chargés de communication de la Primature et de la Présidence ainsi que certains journalistes griots de la presse privée acquis à la cause du régime pour vilipender les dirigeants du Collectif « Sauvons le Togo » et peindre Faure Gnassingbé tout en blanc. Par la même occasion, des articles de presse à charge contre Me Zeus Ajavon et les siens seront commandés. Mais cette agitation n’est que la preuve que le régime Faure Gnassingbé est aux abois. Un régime au pouvoir a-t-il besoin d’être soutenu à travers de pareilles initiatives comme les marches ? Assurément pas, puisqu’il a tous les moyens d’agir sur le cours des choses. Le Prince même se sent perdu et il a besoin de pareils montages pour s’illusionner et tromper la vigilance de la communauté internationale. D’ailleurs on ne soutient que quelque chose qui tangue.
 
Tino Kossi
 
liberte-togo.com
 

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