Napo-Tchin, représentant FRAC : « Pour nous, c’est une injure aux Togolais et même au RPT de penser qu’une seule famille peut diriger ce pays »
La tournée nationale de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC), entreprise depuis le mois de mai 2011, s’est achevée dimanche 18 décembre 2011 à Kara dans la Région de la Kara. Contrairement à ce qui se dit, c’est une grande foule qui a accueilli à Kara Jean-Pierre Fabre et sa délégation.

A cette étape, M. Napo Tchin, enseignant au lycée et à l’Université, et représentant du Front républicain pour l’alternance et le changement (FRAC) dans la Kozah, a lu une déclaration riche d’enseignement des militantes populations du FRAC/ANC de la préfecture. Dans cette déclaration que nous vous reprenons en intégralité en attendant de revenir dans la parution de demain sur celle des populations du Doufelgou, il peint les conditions désastreuses dans lesquelles vit la majorité de Togolais alors qu’un groupuscule a fait main basse sur toutes les richesses du pays. « Sinon quelle école permet-elle de sortir ces gens si riches ? Si ce n’est l’école de la corruption, du blanchiment d’argent, des détournements des deniers publics, de contrat mystique, etc. ? », s’est-il demandé. Lecture.
Déclaration des militantes populations du FRAC/ANC de la Kozah
Excellence Monsieur le Président de l’ANC!
Excellences Messieurs les responsables du FRAC!
Mesdames et Messieurs les membres de la Délégation !
L’honneur nous échoit de prendre la parole devant cette auguste assemblée au nom de la majorité silencieuse, pour souhaiter la cordiale bienvenue à toute la délégation et à tous ceux qui sont ici présents.
Excellence Monsieur le Président !
Les jours se suivent mais ne se ressemblent pas. En effet, c’était le 24 février 2010, à l’occasion du meeting du FRAC pour l’élection Présidentielle, que la population de la Kozah et de ses environs, a eu droit à une rencontre de telle taille. Aujourd’hui, ce n’est pas dans le cadre d’une campagne électorale mais plutôt dans le cadre d’une tournée d’information et de la sensibilisation ; sensibilisation, pour expliquer et faire comprendre à la population des profondeurs la situation politique de notre cher pays. Sans avoir connaissance de l’ordre du jour, c’est ce à quoi l’on pourrait s’attendre.
Cependant, la situation actuelle, dans laquelle est plongée presque toute la population togolaise doit attirer notre attention. Une attention particulièrement tournée vers la grande misère qui a élu domicile dans les ménages, qui se battent becs et ongles pour survivre. Comme si certains étaient plus Togolais que d’autres. Ces Togolais, une très petite minorité vivant dans une opulence insolente, qui sont-ils? Ces Togolais, qui narguent de façon arrogante et désinvolte la plus grande majorité, condamnée au silence et à la mendicité, qui sont-ils ? Sinon quel diplôme faut-il avoir pour être député, directeur de société, ministre ou président de la République? Sinon quelle école permet-elle de sortir ces gens si riches ? Si ce n’est l’école de la corruption, du blanchiment d’argent, des détournements des deniers publics, de contrat mystique, etc. ? Pour répondre à toutes ces questions, vous n’avez pas à chercher de midi à 14h. C’est bien des gens comme nous. Que dis-je ? Des gens comme vous et moi, qui parfois sont de moralité très douteuse par leurs diplômes acquis ou non par des moyens peu orthodoxes, par leur désir très poussé pour les vices les plus courants.
L’heure est très grave, sinon gravissime. En témoignent les mouvements de contestation par ci et par là qui ont pour dénominateur commun les souffrances et la pauvreté. C’est l’expression d’un ras-le-bol. Le Togo tant chéri, comme l’or de l’humanité, n’est plus que le sable de la mort. Les agents de la santé ont donné le ton parce que se sentant mal traités et mal rémunérés. Ensuite, les autres fonctionnaires, qui ont été trompés et manipulés car il n’y aura jamais de mouvements. Et enfin, les étudiants, les élèves et les enseignants qui estiment être, avec raison la couche la plus prépondérante dans la fonction publique, la plus marginalisée et la plus défavorisée. C’est dans ce corps de métier que l’on a les vacataires, les volontaires, les contractuels, les auxiliaires ou « pagedois », les intégrés et les soi-disant plus nantis, les enseignants fonctionnaires qui n’ont ni primes, ni indemnités comme les autres fonctionnaires. Pourquoi ce mépris pour cette catégorie de fonctionnaires Togolais, alors que sans enseignant, il n’ y a ni de présidents, ni de ministres, ni de députés, ni de médecins, ni de commerçants et ni même de paysans? Au lieu de régler globalement les problèmes soulevés par ces différents mouvements, le gouvernement préfère la voie du silence, de l’intimidation, de la négligence, de la banalisation etc. Trop souvent, beaucoup de communications des célèbres ministres ou des ministres néophytes entretiennent ou enveniment ces mouvements.
Excellence Monsieur le Président !
Militants et Militantes de l’ANC!
Tout ceci montre à suffisance que le gouvernement, qui a défini ses priorités si nombreuses, n’accorde aucun intérêt à ceux pour qui il semble lutter. A entendre certains ministres raisonner, on comprend aisément qu’ils ne défendent que leur poste. Si on était dans un pays normal, concernant la gestion des crises récentes, tout le gouvernement devrait démissionner ou tout au moins beaucoup de têtes devraient tomber, mais comme d’habitude, la solidarité gouvernementale voudrait que chacun protège chacun. On se demande comment se fait un conseil de ministres togolais ? Sinon, les décrets qui y sortent ne semblent pas être discutés et adoptés. La première priorité pour respecter les OMD à l’horizon 2015 pour notre pays, c’est de réduire la pauvreté de moitié. Pourquoi ne pas améliorer les conditions de vie et de travail des Togolais, pourquoi ne pas voter des décrets plus sociaux et humains comme aussi améliorer les conditions de vie et d’études des élèves et étudiants en accordant des plans de bourses et d’aides sociales aux conditions plus souples aux étudiants et reprendre le système de quart ou de demi-bourses aux élèves des collèges et lycée les plus méritants ? Excusez-nous de le dire, comme ils aiment souvent insister de façon sûre, « l’excellence et le mérite doivent primer », combien parmi eux ont-ils connu ce luxe ? Combien de Togolais ont-ils eu ne serait-ce qu’une mention assez bien avant d’être haut perché ? L’excellence, OUI, mais le social d’abord. Nous gagnerons beaucoup en partageant les richesses du pays de façon rationnelle pour nous préserver de violentes revendications vers la fin de cette année.
D’ailleurs, l’une des fonctions importantes de tout Etat, c’est la fonction de répartition qui permet de lutter efficacement contre la pauvreté. Nous ne parlons même pas de chômage, même si ces derniers temps, un effort est fait dans le recrutement des jeunes. Et là encore, on assiste à une forme de mafia togolaise, où les postes dits juteux sont créés pour aider les mieux lotis, où un conseil national de jeunesse s’arrache les prérogatives d’un cabinet de recrutement. A titre d’exemple nous citons, le projet PROVONAT, dans lequel il faut être dans les bonnes grâces du gouvernement avant de prétendre à un poste. L’enfant d’un pauvre paysan de Bassar, de Barkoissi, Blitta, Babamé Bodjé, Badou, Bagbé, etc. doit pouvoir avoir les mêmes chances de réussite, à travers l’excellence et le mérite, c’est ici qu’il faut plutôt l’appliquer. Cela éviterait que les nuls et les minables nous gouvernent.
Un tout petit pays, une portion rectangulaire où vivent pourtant des gens valeureux et honnêtes, mais qui, depuis près d’un demi-siècle, n’ont réellement pas eu de paix véritable et de réel bonheur. Un pays pris en otage par une poignée de personnes qui vivent dans une opulence criarde grâce au pillage systématique des ressources du pays, au détriment de la plus grande majorité des Togolais qui croupit dans une misère indicible. Pour eux, paysans, fonctionnaires, commerçants, militaires, etc., chaque jour qui passe est une lutte perpétuelle pour la survie. Pendant ce temps, nos bourreaux, parmi lesquels on compte des gens de mauvaise moralité, coulent des jours heureux. Ces personnes, tombées dans une profonde ignominie, usent de tous les subterfuges pour s’agripper au pouvoir, obstruant ainsi la voie au changement et à une alternance, que l’écrasante majorité des Togolais appelle de tous ses vœux depuis plus de deux décennies.
Il n’est un secret pour personne que seule l’alternance offre à un pays des chances réelles de son développement. Les exemples sont légion : ceux de nos voisins du Nord, de l’Est, mais aussi de l’Ouest, le prouvent à suffisance. Pourquoi pas le Togo ?
Au moment où l’alternance est de mise sous d’autres cieux, le RPT, lui, a choisi la voie de la confiscation et de la pérennisation d’un pouvoir qui a plutôt œuvré à la paupérisation des Togolais et muselé les populations. Comme le père, le fils, a été porté à la magistrature suprême sur la base d’aucun projet de société digne de ce nom. Comme nous le vivons sous nos yeux ces derniers jours, on assiste à toutes les machinations : CPDC dit Rénové, idées lugubres de création d’un nouveau parti, tractations diverses avec certains individus peu honnêtes des chancelleries etc., pour pouvoir se maintenir et permettre au fils de faire comme le père 20 ans, après 30 ans et après…..Pour nous, c’est une injure aux Togolais et même au RPT de penser qu’une seule famille peut diriger ce pays, même moi-aussi je peux être Président, parce que je ne manque pas de qualités ; l’âge, le niveau intellectuel, la responsabilité familiale ou la chaleur d’une vie en famille, etc.
Ce serait être aveuglé par le pouvoir que de ne pas voir et comprendre que le peuple togolais veut voir autre chose : l’alternance, le changement, seul gage d’efficacité. En effet, quand on sait que dans 5 ans on sera jugé par les urnes, on est obligé et forcé de mieux faire.
C’est vrai que ces deux jours on voit des chantiers à Lomé, soulignons qu’il n’il y a pas que Lomé qui a besoin des grands travaux, Kara aussi en a besoin, même Pya aussi en a besoin. Ce qui a été possible maintenant était possible il y a 44 ans.
Bien souvent, l’on considère la préfecture de la Kozah comme le fief du pouvoir RPT. Tellement confinée au silence, au gain facile et à la mendicité, sa population n’avait plus d’autres choix que de rester là où on l’a laissée. Qui aurait cru qu’à Kara on puisse assister à un soulèvement d’une telle violence? Comme disait quelqu’un que nous connaissons tous, «on ne peut pas tromper le peuple tout le temps», fin de citation. Au même moment qu’on fait comprendre à la population qu’il n’y a plus de liquidités, nous observons que le train de vie de nos gouvernants est sans commune mesure avec l’austérité qu’on impose aux gouvernés. A Kara, à la surprise générale, beaucoup de personnes n’arrivent pas à assurer leurs trois plats quotidiens. Par exemple, l’année passée, une étudiante en semestre 4 s’était fracturée la colonne vertébrale en cherchant les feuilles de baobab pour en faire la sauce. Elle est aujourd’hui paralysée à vie…Par contre, à côté, quelqu’un s’offre un vieux bâtiment à 300 millions qu’il a rénové. D’où lui vient cette somme quand on sait que nous sommes dans une cure d’austérité ? Un petit calcul s’impose. Mais point n’est besoin de s’y aventurer, parce que même si les ministres étaient payés à 10 millions en 5 ans, ils ne sauraient avoir cette somme. C’est évident que les gens ne crient pas à la télé parce qu’ils aiment trop notre pays, mais parce qu’ils s’aiment eux-mêmes. A nous d’en juger ! Mais la plupart de nos concitoyens ont compris que le mépris, le dédain, l’arrogance de certains sont des cris de détresse qui ne sauront durer.
Pour une affaire de manifestation des étudiants, on remplace un préfet civil par un préfet militaire, de surcroît l’aide de camp de son Excellence !!! Ce dernier, s’il n’est pas en punition, il doit être en mission recommandée : mater, réprimer, tuer ou…En tout cas, nous attirons l’attention de toute la communauté nationale et internationale de ce qui pourrait advenir et nous mettons en garde tous ceux qui, nostalgiques des méthodes répressives et rétrogrades, oseraient attenter à la vie et l’intégrité physique d’un quelconque citoyen Ayez à l’esprit l’origine du printemps arabe. Les militaires, qui aiment bien leur Président de la République, doivent protéger la population, car les souffrances ne sont pas seulement l’apanage des enseignants, commerçants, étudiants et autres, elles sont également et surtout le lot quotidien de ceux-là mêmes qui ont inventé le mot découvert bancaire, astreints à des salaires de misère qui compromettent leur motivation au travail et les tiennent en respect du grand maître. Sinon, les officiers ne devraient pas jurer leur fidélité à une personne mais à la population dans leur rapport annuel.
Excellence Monsieur le Président !
Militants et Militantes de l’ANC!
Nous fustigeons les ambassades, composées de ministres, de députés et des cadres, envoyées dans les préfectures du Nord pour raisonner les étudiants de l’UK après la vague de protestations contre le décret instituant les bourses et supprimant les allocations de secours aux semestres I et II. Pour nous, l’UK est une Université nationale et non une Université destinée aux ressortissants d’un Nord qui n’existe que dans la mentalité de ceux qui l’ont inventé. Par conséquent, la crise que traverse cette Université doit être résolue au plan national et non dans les villages ou préfectures du Nord, cela éviterait des frais de missions inutiles qui pourraient servir à résoudre partiellement ces problèmes. Ceux-là qui entretiennent un tel sentiment et s’escriment à l’encenser dans l’esprit des jeunes qui ne demandent que de meilleures conditions d’études sans distinction de région, d’ethnie, de préfecture doivent être considérés comme des fossoyeurs de la Nation que les togolais s’efforcent de construire depuis 50 ans.
Excellence Monsieur le Président !
Enfin, nous vous rassurons que la population de la Kozah, à l’instar de celles des autres préfectures que vous avez visitées, est éprise de démocratie et de changement véritable pour lesquels vous vous battez inlassablement depuis plusieurs décennies. Son engagement à vos côtés est total et sincère.
Vous pouvez compter sur elle pour l’avènement d’un Togo nouveau, uni et solidaire.
Excellence Monsieur le Président !
Militants et Militantes de l’ANC!
Kara dit non à la misère qu’on leur offre ! Halte aux affectations punitives, à la répression des manifestations, aux crimes financiers…la CPI veillera….
C’est aujourd’hui le temps du changement !
C’est aujourd’hui l’heure de l’alternance au Togo !
Un jour nouveau doit se lever à partir de 2012 sur les Togolais.
Je vous remercie.

Fait à Kara, le 18 décembre 2011

Les militants du FRAC-ANC – Kozah

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