Trafic de drogue et commerce de voitures d’occasion

L’information fait actuellement la une des medias internationaux. Le commerce des voitures d’occasion qui a pignon sur rue au Bénin, au Ghana ou au Togo, sert à financer le Hezbollah. En plus, le Libanais Maroun Saade, présenté comme lié au Hezbollah, est soupçonné par les Américains d’avoir corrompu des officiels togolais pour étouffer une enquête contre un certain Imad Zbid. Une mauvaise publicité à laquelle les autorités togolaises n’ont pas encore réagi.
Hezbollah un mouvement très controversé
Le Hezbollah qui signifie Parti de Dieu en arabe, est un mouvement politique chiite créé en réaction à l’invasion israélienne du Liban en 1982. Bien qu’étant un parti officiel au Liban, le Hezbollah est très critiqué par les pays occidentaux. Tenu pour responsable de nombreuses prises d’otages d’Occidentaux, pour l’essentiel diplomates et journalistes, et de soldats israéliens occupant le sud-Liban dans les années 1980 et de l’orchestration d’attentats spectaculaires et meurtriers contre les forces occidentales présentes au Liban à cette époque, le Hezbollah est placé sur la liste officielle des organisations terroristes du Canada, des Etats-Unis d’Amérique et de l’Australie.
Quant à la position de l’Union européenne (UE), elle est contrastée. Par la voix du président de l’Union en exercice au 1er août 2006, l’UE signale que le Hezbollah ne sera pas inscrit sur la liste des organisations terroristes; toutefois, le Conseil de l’Union européenne inclut l’officier supérieur des services de renseignements du Hezbollah Imad Fa’iz Mughniyah (alias Mughniyah, Imad Fayiz) sur sa liste de terroristes.
L’ONU ne classe pas le Hezbollah dans sa liste des organisations terroristes mais le Conseil de sécurité de l’ONU appelle à son désarmement. En revanche, le mouvement est très populaire dans le monde arabo-musulman.
Selon les informations, le groupe est financé principalement par l’Iran et la Syrie, ainsi que par des fonds privés. Il est par ailleurs soupçonné de se financer par le biais de commerce de diamants illicites, de trafic de drogue, de racket, de contrebande. Il est accusé nommément par le Département d’État de trafic d’héroïne et de cannabis. Par exemple, suite à un coup de filet des polices brésiliennes et équatoriennes, mené le 21 juin 2005, mettant à jour un réseau international de trafic de drogues, des soupçons se portent sur ce mouvement comme éventuelle destination des fonds issus de ce trafic. Et les pays africains qui comptent une forte présence libanaise, sont souvent soupçonnés d’être la plaque tournante des trafics de tous genres.
Le Togo accusé
L’information est tombée jeudi 15 décembre 2011. Les autorités américaines ont annoncé avoir porté plainte devant un tribunal de Manhattan, contre plusieurs établissements libanais. Elles accusent ces établissements, notamment financiers, d’avoir participé au blanchiment de plus de 483 millions de dollars (225 milliards FCFA) via les Etats-Unis et l’Afrique de l’Ouest, en lien avec le trafic de drogue et le commerce de voitures d’occasion. « D’après le procureur de Manhattan, Preet Bharara, des centaines de millions de dollars ont été envoyés au Liban entre 2007 et 2011, à partir notamment du Bénin, du Togo et du Ghana. Une partie en liquide, via des courriers humains, l’autre via différents établissements libanais. Dans le collimateur des autorités américaines : la banque libano-canadienne, sur liste noire aux Etats-Unis depuis février dernier, pour des comptes ayant servi de lessiveuse d’argent sale. Parmi ses clients, un certain Ayman Joumaa, ressortissant libanais poursuivi aux Etats-Unis pour trafic de stupéfiants et blanchiment d’argent de la drogue entre l’Afrique de l’Ouest, l’Amérique latine, l’Europe et le Liban. Et cela en cheville avec des organisations criminelles mexicaines et colombiennes. D’autres établissements détenus par des Libanais, présentés comme liés au Hezbollah, sont visés par la plainte américaine. Sont ainsi cités la compagnie de change Hassan Ayash, le groupe Ellissa, actif dans l’importation de voitures d’occasion au Bénin, et Cybamar Swiss, une société de transport maritime chargée de l’acheminement des véhicules au Bénin et au Togo », rapporte RFI.
Outre Ayman Saied Joumaa, le procureur de Manhattan cite Maroun Saade, un Libanais présenté comme lié au Hezbollah, poursuivi aux Etats-Unis pour une grosse affaire de cocaïne et d’héroïne afghane, affaire encore une fois liée à l’Afrique de l’Ouest. « La justice américaine le soupçonne, en outre, d’avoir corrompu des officiels au Togo pour étouffer une enquête contre un certain Imad Zbid, un important représentant du Hezbollah. Son organisation est accusée d’avoir transporté deux à trois tonnes de cocaïne de l’Amérique du Sud au Togo », poursuit l’article publié sur le site de la radio mondiale.
Selon la plainte de 75 pages sur laquelle nous sommes tombés au cours de nos recherches, des passeurs de fonds à travers la frontière Togo/Ghana sont parfois appréhendés et leurs fonds saisis par les services togolais quand ils tentent de faire passer l’argent sans le déclarer ou en violation des restrictions sur les importations de devises décidées en octobre 2008. Maroune Saade aurait versé des pots-de vin pour libérer ces passeurs de fonds et d’autres arrêtés par la police. Par exemple, le 15 mars 2009, Mehanna Houssam, employé d’Oussama Salhab, a été arrêté par la police togolaise. En échange d’un paiement, Saade a obtenu la libération de Houssam.
De plus, la plainte identifie un certain Oussama Salhab, responsable présumé du Hezbollah, vivant au Togo, et qui aurait envoyé des millions de dollars et d’euros du Bénin au Liban. M. Salhab et des proches possèdent « Cybamar », une entreprise de transports basée dans le Michigan (nord des Etats-Unis) et régulièrement utilisée pour envoyer des voitures en Afrique de l’ouest, selon le procureur.
Par exemple, le 5 janvier 2009, Mouhsen Ali Yassine, un citoyen libanais vivant au Togo, a été arrêté et interrogé par les services américains quand il tentait d’entrer aux Etats-Unis par l’aéroport international de Boston. Au cours de cet interrogatoire, il a reconnu que lui et sa famille sont membres de Hezbollah. Il avait sur lui une carte d’affaires de l’agence de voyage Salhab basée au Togo. La carte SIM de son portable a été découverte, cachée dans ses chaussures. Résultante, il a été expulsé. Yassine était accompagné de neuf (9) autres Libanais dont la plupart sont du Togo et qui ont tenté d’entrer aux Etats-Unis presqu’à la même période. Tous ont mis Fadi Salhab comme personne à contacter lors de la demande de visa.
Selon toujours la plainte, entre 2003 et 2011, au moins 34 individus qui ont transporté de l’argent du Togo au Ghana, ont aussi fait de demandes de visas pour entrer aux Etats-Unis. La plupart d’entre eux se sont identifiés comme commerçants ou acquéreurs de voitures, et certains se sont déclarés comme acheteurs de voitures d’origine américaine qui ont reçu de liens à l’étranger à partir de Hassan Ayash Exchange, Ellissa Exchange, LCB comme leur lieu de contact lors de leur séjour américain.
De plus, beaucoup de fonds passent de la frontière entre le Togo et le Ghana. « L’argent est habituellement transporté du Bénin en direction de l’aéroport d’Accra au Ghana, distant de Cotonou d’environ 210 km. La route de Cotonou à Accra passe par le Togo et sa capitale Lomé, à la frontière avec le Ghana. Les services ghanéens des douanes et taxes ont enregistré approximativement 1,2 milliard de dollar déclarés en devise américaine, et qui ont été importés à travers la frontière de Lomé entre 2007 et 2008. Environ 845 millions de dollar de ce montant ont été déclarés par des Libanais. D’Accra, l’argent est souvent convoyé au Beyrouth. La sécurité de Hezbollah facilite la réception de l’argent convoyé à l’aéroport international de Beyrouth », précise la plainte.
Silence à Lomé
Le gouvernement togolais qui a l’habitude de tempêter devant de pareilles situations, s’est muré dans un silence assourdissant. Même « republicoftogo » du tandem Debbasch-Finel qui est prompt à faire des commentaires tendancieux, ne s’est contenté que de reprendre l’article de l’AFP avec un nouveau titre : « Comment les voitures d’occasion servent à financer le Hezbollah ».
En rappel, ce n’est pas la première fois que le Togo est accusé d’être la base arrière de Hezbollah. Déjà en 2006, plusieurs media internationaux avaient relayé ces genres d’informations mettant en cause notre pays. « Les amis de Mohammed Al Muhtadi, l’un des responsables locaux du Hezbollah, qui avait été reconduit discrètement en direction de Beyrouth par le Général Eyadéma, ont tissé depuis des réseaux très efficaces qui plongent leur enracinement dans le milieu économique le plus fermé de Lomé, là où se fréquentent les riches togolais et les « investisseurs» français et étrangers. (…)Une importante communauté libanaise vit en Afrique de l’Ouest, et, en particulier, au Togo. Une partie de cette communauté est soumise à des contributions « spontanées » émanant du Hezbollah (classé sur la liste noire des mouvements terroristes par les Etats-Unis). Des collecteurs effectuent des tournées régulières. Les « dons » se font en espèces ; sans laisser de trace. Les autorités togolaises exerçant contrôle actif sur les mouvements de fonds dans les banques, il est étonnant de constater leur manque d’efficacité dans le signalement de transferts suspects depuis plusieurs mois. Ces transferts sont justifiés, une fois de plus, par la vente de voitures d’occasion venues de l’extérieur du continent africain. Une partie de ce commerce lucratif sert à financer, n’en doutons pas, le terrorisme au même titre que le trafic de drogue, d’or et de diamants », avait révélé à l’époque « Infoplusgabon ». Affaire à suivre.
R. Kédjagni
source : liberté hebdo Togo

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