Rien ne semble entamer la détermination des responsables du Collectif Sauvons le Togo (CST) à briser le joug du clan au pouvoir sous lequel ploient les Togolais ; pas même les brutales et sauvages répressions des manifestations tenues à l’appel de ce collectif mardi et hier. A preuve, il rappelle à la mobilisation les populations aujourd’hui conformément au programme initial et annonce pour demain une journée « Togo mort » ainsi que bien d’autres actions.
 
Le pouvoir, à bout de souffle et en manque d’inspirations en dépit de la multitude de « conseillers » du président, n’a eu recours qu’à la force brute. Pis, il n’aurait recouru qu’à une méthode vile pour casser, sinon tenter de casser la dynamique des Togolais qui ont répondu nombreux à l’appel du CST : Distribuer de l’argent (2000 FCFA) à des jeunes « voyous » de Lomé, Hanoukopé plus précisément pour provoquer les forces de l’ordre et appeler tout naturellement une riposte de leur part. Une occasion inespérée pour « rentrer dedans» aux manifestants. Et pour cause, pareille mobilisation dépassait tous les pronostics les plus rationnels. Selon Me Agbodan, SG de la LTDH, la mobilisation de mardi dernier battait même le record de 1990. Même son de cloche chez Me Zeus Ajavon qui ne cache rien de son émerveillement face à une telle mobilisation populaire : « Personnellement, je n’ai jamais vu autant de monde à une manifestation ».
 
Et la riposte était disproportionnée, sinon trop. Elle visait tout le monde et personne à la fois. C’était une répression aveugle. Une pluie de grenades lacrymogènes qui s’abattait sur les manifestants, les riverains de la place Deckon, devenue le point de ralliement des manifestants ou la place Tahrir version togolaise. Et la réplique, c’étaient des jets de pierres et d’autres projectiles côté manifestants. Mais qui était le cerveau d’une telle répression ? Qui avait donné l’ordre de tirer des grenades lacrymogènes? Grand mystère. Ni Gnama Latta le ministre de la Sécurité ni Pascal Bodjona, son homologue de l’Administration territoriale ne reconnaissent avoir donné l’ordre de réprimer les manifestants. Gnama Latta, à en croire les propos rapportés par Me Zeus Ajavon, le coordonnateur du CST, aurait dit que pour lui, il n’était pas normal que des Togolais tirent des grenades lacrymogènes sur d’autres Togolais. Qui avait donc donné ce satané ordre, en dehors de ces autorités habilitées de par leurs titres et rangs, à le faire ? De fil en aiguille, Me Zeus Ajavon dévoilera son nom : Le Lt-Col. Kondi, Chef de la Division des Opérations à la Gendarmerie nationale et qui serait un dévot du très controversé Gal Atcha Titikpina, Chef d’Etat major des FAT (Forces armées togolaises). L’armée togolaise est donc loin d’être cette armée disciplinée. C’est un bazar ou plutôt la cour du roi Petaud et chacun y fait ce qu’il veut. Le Col. Gnama Latta, un ministre de décor ?
 
Selon les témoignages de Me Kpande Adzaré, Président de la LTDH), « ce qui s’est passé ce matin (ndlr : hier) est d’une gravité inouïe. Nous avons assisté ce matin à ce qu’on peut appeler un recul substantiel de la démocratie et de respect de la liberté de manifestation dans notre pays. Qu’est-ce qui s’est réellement passé ce matin à Deckon ? Ceux qui sont venus au carrefour Deckon hier qui ont passé la nuit, ont respecté le mot d’ordre des organisateurs qui consistait à passer les trois nuits sur les lieux. Et ce matin, on commençait à dérouler le tapis du programme des manifestations… Mais à un moment donné, nous entendons que des coups de grenades lacrymogènes pleuvaient sur les gens. Il s’agissait d’un acte prémédité. Car de sources concordantes, nous avions l’information selon laquelle ils viendront déloger les manifestants. Et ceci, de la manière la plus barbare qui soit. Plusieurs manifestants sont allés se réfugier dans l’enceinte de l’Eglise catholique d’Amoutivé. Les agents de sécurité ont tiré des grenades lacrymogènes dans l’enceinte de l’église où il y avait des fidèles qui priaient. Des grenades lacrymogènes ont été tirées même dans les salles de classe où les élèves étaient en train de composer. Ce qui nous a émus, nous responsables du CST, c’est que les enfants avaient commencé à suffoquer, et à perdre de la respiration. Les grenades qu’ils ont lancées cette fois-ci n’étaient pas conventionnelles. Les balles en caoutchouc, non plus. Les grenades lacrymogènes étaient tellement suffocantes que ne pouvant pas les supporter, les enfants se sont mis à agoniser. On les portait sur le dos pour les amener à la Croix rouge et se faire soigner puisqu’il n’y avait aucune circulation…. ».
 
Me Célestin Agbogan, sérieusement amoché à la tête est aussi revenu sur le drame qu’il a vécu de son arrestation jusqu’au camp Gendarmerie. Un véritable enfer. Au total, le Collectif dénombre cinquante quatre blessés dont vingt-quatre graves dans la journée du 12 juin 2012, soixante-cinq blessés dont trente-deux graves dans la journée du 13. Au titre des arrestations, 15 personnes arrêtées le 12 juin 2012 et soixante-trois personnes le 13 juin 2012, dont une douzaine au sein de l’église Saint Augustin d’Amoutivé. L’ensemble du matériel de sonorisation déployé sur les lieux a été emporté et saisi.
 
Face à cette situation, le Collectif « Sauvons le Togo » lance un appel aux vaillantes populations de Lomé à se mobiliser de nouveau pour occuper le carrefour Deckon, aujourd’hui à partir de 8h, appelle à une journée Lomé ville morte demain vendredi 15 juin pour protester contre la répression sauvage et barbare dont les manifestations ont fait l’objet les 12 et 13 juin 2012, renouvelle la tenue des deux jours de marches et sit-in dont le déroulement a été perturbé, pour lundi 18 et mardi 19 juin 2012. Et pour couronner le tout, annonce l’organisation d’une nouvelle marche suivie de trois journées de sit-in les mercredi 20, jeudi 21 et vendredi 22 juin 2012, sur toute l’étendue du territoire national.
 
Magnanus FREEMAN
 
 
liberte-togo.com
 

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