Les misères faites à l’ancien ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales Pascal Bodjona par son propre « produit » Faure Gnassingbé, le symbole du désir de ce dernier de rompre avec les hommes et les méthodes du passé ? Ce n’est pas une boutade. C’est sous cet angle qu’est présenté dans certains médias internationaux l’épisode Pascal Bodjona de l’affaire d’escroquerie internationale qui se révèle dans son ensemble comme une conspiration géante, avec pour chef d’orchestre le plus « Faure » des Gnassingbé. Comme dans l’hebdomadaire international « Les Afriques ».
 
Rupture avec le passé
 
« Depuis sa réélection à la tête du Togo en 2010, réélection contestée par une frange de l’opposition, le président Faure Gnassingbé, en vue de donner un autre visage au Togo et à son régime, s’est engagé à faire le ménage autour de lui. C’est ce que nous confie une source diplomatique qui partage souvent la table présidentielle. «Le président est agacé par la lenteur des réformes initiées et ne supporte plus les vieilles lunes». En clair, Faure veut rompre avec les méthodes d’avant la fin de la guerre froide. D’où la dynamique de changements enclenchée depuis deux ans et qui n’épargne personne. La disgrâce touche le sérail, l’arrière cour et les proches. Les résistances sont vives dans le cercle le plus immédiat. D’où cette guerre de positionnement à l’intérieur du régime. C’est là qu’il faut situer la disgrâce de Pascal Bodjona survenue à la vitesse d’une comète », lit-on dans la parution N°213 du 20 au 26 septembre du journal édité en Suisse, dans un article intitulé : « Faure Gnassingbé Vs Pascal Bodjona : les dessous d’une rupture au sommet ».
 
Pour qui suit cette affaire d’escroquerie internationale et surtout l’épisode Pascal Bodjona, cette conception pourrait paraître bien drôle. Et sans doute que parmi les farouches partisans de Faure Gnassingbé mêmes, on sourirait à la lecture de ces mots. Difficile de croire à cette boutade – cela y ressemble beaucoup – lorsqu’on considère toutes les péripéties de cette affaire.
 
Règlements de comptes et acharnement manifestes contre un serviteur ambitieux
 
C’est sous cet angle qu’il convient de concevoir les misères faites à Pascal Bodjona, et rien d’autre. Jusqu’à présent, l’opinion nationale attend d’être convaincue sur l’implication de l’ancien homme à tout faire de Faure Gnassingbé dans cette histoire. Tout le déroulement de l’affaire prouve plutôt un acharnement, une volonté manifeste de noyer l’ancien porte-parole du gouvernement. Le processus est tout simplement vicié. Bien qu’il y eût la possibilité de l’entendre à l’époque où il était encore au gouvernement – il en aurait même fait la demande-, Faure Gnassingbé ayant des comptes à lui régler, ne lui en a pas donné l’autorisation.
 
Pascal Bodjona était cité dans l’affaire juste comme témoin. Mais le 10 août lors de son audition par le juge Mataké Kéléwani, on a tenté de l’inculper. La feuille était même remplie à cet effet. Il a fallu la dextérité de ses avocats pour lui empêcher un tel sort. Au centre de toutes ces manœuvres, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Me Tchitchao Tchalim. Outré par les pressions, le juge a dû lui cracher de venir l’inculper lui-même. Le lundi 13 août, tout était entrepris au niveau de la Prison civile de Lomé pour l’écrouer. Ayant sans doute senti le coup, il y a échappé en faisant un recours de la procédure.
 
Ses détracteurs ne parvenant pas à l’avoir, ils ont décidé de passer à la vitesse supérieure. C’est ainsi qu’ils réussirent à convaincre la supposée victime de l’escroquerie, l’Emirati Abbas Al Youssef à descendre à Lomé. Sous prétexte que ce dernier a déposé une autre plainte, l’ancien ministre de l’Administration territoriale sera cueilli à son domicile au petit matin du samedi 1er septembre, direction la Gendarmerie. Là commença tout un autre épisode. Une nouvelle procédure est enclenchée et les tractations continuent. Entre-temps des manœuvres sont entreprises à l’endroit des avocats de Pascal Bodjona afin qu’ils convainquent leur client à avouer sa culpabilité. Un piège que l’ancien ministre déjoua. Entre-temps aussi, celui qui prétend avoir été escroqué à hauteur de 50 millions de dollars est le premier à proposer à Sow Bertin Agba une solution à l’amiable. Le principe de 5 millions de dollars fut acquis. Mais l’Emirati fit volte-face au dernier moment. De témoin dans la plainte initiale, Pascal Bodjona a été inculpé le 12 septembre dernier pour « complicité d’escroquerie » et placé sous mandat de dépôt.
 
Abbas Al Youssef est rentré il y a quelque temps à Paris ; mais Faure Gnassingbé, comme s’il avait un intérêt particulier à défendre dans cette affaire, a affrété un avion pour aller le chercher, après l’arrestation et l’extradition de Loïk Le Floch-Prigent, pour une confrontation générale. Mais on a bien peur qu’elle n’ait jamais lieu, puisque tous les accusés demandent au plaignant d’apporter les preuves de ses accusations. Ce qu’Abbas Al Youssef n’a pas fait jusqu’à présent. Bien plus, Bertin Agba refuse légitimement la confrontation parce que la Cour suprême avait ordonné depuis le 20 juin dernier sa libération provisoire contre le paiement d’un cautionnement de 150 millions de FCFA. Condition qu’il a satisfaite, mais il est toujours gardé à la Prison civile de Tsévié. Quant à Pascal Bodjona, il tire argument du recours qu’il a formé devant la Cour suprême dans la première procédure pour s’y opposer. On est en face d’un blocage, et bien malin qui pourrait présager quand et comment on pourrait en finir avec ce dossier.
 
Il faut le constater, toute la procédure est cousue de fil blanc. L’affaire même semble une mise en scène grandeur nature. Les avocats de Bodjona sont montés au créneau le dimanche 16 septembre dernier pour dénoncer les vices qui caractérisent le dossier ou plutôt les dossiers. Puisque pour une même affaire, ce sont deux procédures qui sont entreprises et s’enjambent fort bien. Quelle est donc cette affaire privée entre deux partenaires d’affaires qui intéresse tant le sommet de l’Etat togolais, au point de mettre les moyens pour aller chercher le plaignant alors qu’il n’a apporté jusqu’à présent aucune preuve de ses accusations ?
 
Ce n’est quand même pas de cette façon qu’on fait les réformes! On ne le dira jamais, et les Togolais en sont d’ailleurs convaincus, cette affaire n’est qu’une passerelle pour Faure Gnassingbé pour régler des comptes à son ex-homme à tout faire et le coincer pour ses ambitions présidentielles. Comme le révélait tout récemment « La Lettre du Continent ». Le reste n’est que diversion. Et ces écrits de « Les Afriques », on peut bien les classer au registre des articles commandés par le pouvoir pour polir son image. Comme nous le révélions dans la parution N°1280 du 27 août dernier.
 
Tino Kossi
 
liberte-togo
 

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