Plus d’une centaine de citoyens togolais, indignés, choqués et désabusés, ont manifesté leur colère en bloqué la circulation toute la matinée du 20 janvier 2012, devant le siège de l’institution de micro finance Investir Dans l’Humain (IDH) à Lomé. La raison ? Ils ou elles ont déposé leur épargne, pensant en retour pourvoir bénéficier d’un crédit à terme. Mais la réalité est que cette institution non seulement n’a pas honoré ses engagements, mais ne peut pas rembourser les sommes déposées par les épargnants. Les citoyens togolais sont donc spoliés de leur argent et de leurs droits parce qu’il n’y a pas de vérité des comptes. Le Gouvernement RPT/AGO, au lieu de laisser la justice faire son enquête et exiger la vérité des comptes et éventuellement prononcer des sanctions, garde ses habitudes autocratiques en optant pour des décisions unilatérales, empêchant les citoyens togolais de récupérer leur épargne et surtout d’identifier les responsables pour que cela ne se reproduise plus.
1. IDH, RESEAU D’ONG POUR COLLECTER L’EPARGNE ET OFFRIR DES MICRO-CREDITS, MAIS PLUS RIEN…
Investir Dans l’Humain (IDH) Microfinance est réseau d’organisations non gouvernementales qui se sont spécialisés dans la fourniture de micro-crédit et l’intermédiation en microfinance. IDH a commencé ses activités en 1999 1. Ce réseau d’ONG vient souvent compléter l’absence de banques – qui considèrent souvent ce segment d’activité insuffisamment rentable – et répond aux besoins de la population togolaise dans les espaces décentralisés notamment en zone rurale. La pauvreté en zone urbaine est telle que cette structure répondait à un besoin réel. Mais malheureusement comme tout ce qui est trop lié, de près ou de loin, avec le système RPT/AGO, c’est la mauvaise, voire très mauvaise gouvernance qui finit par l’emporter, dilapidant ainsi l’épargne des Togolais et Togolaises. Les objectifs affichés étaient pourtant nobles. L’ONG IDH-microfinance regroupait environ une soixantaine de petites ONG qui occupaient environ 300 travailleurs, souvent volontaires et donc mal payés, qui faisaient en fait un véritable sacerdoce en tentant de contribuer à générer des revenus pour les populations marginalisées par le secteur bancaire officiel. Les activités de micro-crédit attiraient une population qui faisait confiance aux dirigeants de l’IDH-microfinance.
Le problème est que ses dirigeants – en tout cas le premier d’entre eux – sont membres de groupes ésotériques et en même temps des dignitaires du RPT. Dès lors que ces dignitaires du RPT décident de faire main basse sur l’épargne des Togolais et Togolaises, il est difficile pour les dirigeants de l’IDH-microfinance de contester quoi que ce soit, à moins de devenir opposants déclarés au système RPT et de se faire rappeler à l’ordre pour des forfaitures passées, utilisées pour un chantage institutionnalisé. Alors, il faut être clair : l’objectif de la réduction de la pauvreté tant affiché n’a pas été atteint, au contraire, c’est un appauvrissement des populations et une perte de confiance généralisée qui s’est instauré. Le gouvernement, au lieu de laisser une justice indépendante faire son travail, fait de l’ingérence, fait semblant de payer les gens petit à petit, sans jamais finir de rembourser les sommes épargnées et déposées en comptant sur l’oubli et l’amnésie des chancelleries occidentales, pour faire régner la contre-vérité des comptes dans ce dossier. Ces micro-crédits ont malgré tout permis ici et là de soutenir, très modestement des dossiers touchant à l’éducation, la santé, la communication et les transports, l’agriculture notamment l’élevage et la pêche, le commerce et même la création de très petites entreprises.
Hormis son vaste programme de développement qui s’articule entre autres, autour de l’éducation et la formation, la santé, le développement communautaire, la communication, le réseau a élaboré un système de collecte d’épargne à travers sa micro finance, pour contribuer au financement des activités génératrices de revenus pour les populations cibles. Il faut donc nécessairement trouver les moyens de faire re-fonctionner un système plus efficace – avec des personnalités indépendantes du système RPT – lequel continue à organiser le Togo sur une base patrimoniale. IDH fonctionnait en fait comme une petite banque avec des produits financiers fondés sur l’épargne d’une part avec des dépôts à vue, des dépôts à terme, voire des placements ou d’autre part permettant d’obtenir des crédits de type : crédit au particulier ou à une personne morale, crédit à un groupe ou à une tontine, etc. Là où l’opacité régnait, c’est sur les différents produits financiers qui devaient rapporter « gros ». Sans enquête, personne ne peut dire si ces « investissements » ne profitaient pas en retour de blanchiment d’argent, de recettes sur la vente de drogue ou de malversations diverses. Le Gouvernement n’a donc aucun intérêt à voir un juge indépendant enquêter pour obtenir la vérité des comptes. Mme Hilary Clinton est loin de se douter qu’une structure comme IDH peut servir au blanchiment d’argent. D’ailleurs, c’est une drôle de coïncidence que ce soit après son départ que IDH est en fait « liquidé » en bonne et due forme, ce sans aucune enquête judiciaire.
Selon Barnabo Nampoukime DONAM, IDH est réparti sur les 5 régions du Togo et regroupe les structures suivantes :

IDH-Microfinance – Répartition territoriale en 2008 (liste non exhaustive)*

Sigle Appellation, lieu et nombre de guichets/caisses
AFP Ami Financier des Pauvres, Dapaong avec 12 guichets/caisses
MUCAD Mutuelle des Cadres pour le Développement, Kara avec 13 guichets/caisses
F2S Fond Social de Solidarité, Kara avec 12 guichets/caisses
ESF Epargne Sans Frontière, Sokodé avec 17 guichets/caisses
MUECA Mutuelle d’Epargne et de Crédit pour la promotion de l’Artisanat, Atakpamé, avec 17 guichets/caisses
ENSOBE Entraide Solidarité pour le Bien-être, Kpalimé avec 36 guichets/caisses
VOVO Mutuelle d’épargne et de crédit, Tsévié avec 95 guichets/caisses
*Les informations sur les guichets et caisses dans la capitale n’a pas été diffusée.Source : Barnabo Nampoukime DONAM (2008) (voir note en fin d’article).

Selon les témoignages recueillis auprès des épargnants venus exprimer leur ras-le-bol 2, IDH micro finance n’est plus en mesure aujourd’hui de rembourser les dépôts des centaines de milliers d’épargnants qui avaient confié le fruit de leur labeur, dans la perspective d’obtenir des prêts pour entreprendre des activités génératrices de revenus. Rappelons qu’en termes économiques cela s’appelle banqueroute et qu’en droit la banqueroute constitue un délit de cessation de paiements due à des négligences (banqueroute simple) ou à des actes irréguliers (banqueroute frauduleuse).
Pour l’instant rien ne permet aux épargnants qui ont confié leur argent à IDH de connaitre dans quel cas de figure se trouve celle-ci (banqueroute simple ou frauduleuse). Comme à son habitude le Gouvernement RPT/AGO pratique une gestion très opaque du dossier. C’est dans un communiqué du 27 juillet 2010, que le ministre de l’Economie et des Finances Adji Otèth Ayassor – autorité de tutelle des institutions mutualistes ou coopératives d’épargne et de crédit au Togo -, rendait publique la mise sous tutelle d’IDH : « Le contrôle a révélé que l’institution IDH-Microfinance traverse une situation financière préoccupante caractérisée par une dégradation avancée des fonds propres. En conséquence, le Ministre des Finances a dissous les organes d’administration, de gestion et de contrôle de IDH-Micro finance et mis celle-ci sous administration provisoire conduite par M. Kodzo Homdéafi Mablé».
Après un an et demi de gestion sous tutelle, supervisée par le gouvernement RPT/AGO, l’argent déposé par les épargnants se serait volatilisé des coffres d’IDH. Comme la transparence de la gestion publique est une notion à géométrie variable pour le Gouvernement RPT/AGO, il est impossible de dire à ce jour combien d’épargnants sont exactement concernés et quel est le montant des sommes en jeu. Où est donc passé l’argent des épargnants ? L’honnêteté de la part du ministre de l’Economie et des Finances Adji Otèth Ayassor, consisterait à rendre ces informations publiques au nom du principe de transparence et surtout des intérêts des épargnants lésés. A défaut, il suffit de confier tout le dossier à la justice indépendante et non affiliée aux intérêts du système RPT pour que la vérité des comptes paraisse au grand jour.
3. AFFAIRES « INVESTIR DANS l’HUMAIN » ET « ReDeMaRe » : DEUX POIDS, DEUX MESURES
L’affaire IDH micro finance pourrait rapidement devenir une nouvelle affaire d’Etat. Elle rappelle le dossier du Réseau pour le Développement de la Masse Ressources (ReDeMaRe), un groupement d’intérêt économique qui réussissait dans la microfinance avant que le Gouvernement RPT/AGO n’intervienne unilatéralement pour faire main basse sur les comptes. On attend toujours la vérité des comptes même, après 13 mois passés en prison inutilement, le Directeur général fut relâché avec obligation de réserve.
Le Gouvernement RPT avait décidé unilatéralement de fermer ReDeMaRe le 8 juillet 2010. Mais nonobstant la concomitance des dossiers, les deux affaires prendront une tournure singulièrement différente. A la différence d’IDH micro finance, contre laquelle les épargnants crient aujourd’hui au scandale et à l’injustice parce que l’Etat refuse de les rembourser entièrement ce qui constitue une spoliation de leurs économies, dans le cas ReDeMaRe, aucun des épargnants n’avait porté plainte. Mieux encore, ceux-ci regroupés dans un comité de défense de leurs droits avaient exigé la reprise des activités de ReDeMaRe. Par ailleurs, à la différence des dirigeants d’IDH micro finance – sans qu’aucune plainte ne soit déposée contre lui ou son institution – M. Sama Essohamlon, Directeur général de ReDéMare passera 385 jours en prison de juillet 2010 jusqu’au 25 août 2011.
Est-ce parce qu’IDH micro finance fut fondée et était dirigée par un ancien Premier Ministre du Togo (1996-1998) sous le règne du feu Etienne Gnassingbé Eyadéma, M. Kwassi Klutsè, que ce dernier bénéficie de la clémence des autorités gouvernementales et judiciaires ? Est-ce parce que Kwassi Klutsè, également Président de la Conférence Panafricaine Coopérative (CPC) et très lié à Faure Gnassingbé qu’il n’est pas inquiété par la justice ? Est-ce parce qu’il est un membre éminent des réseaux ésotériques qui contrôlent le Togo ?
Pourtant il ne manque pas d’actifs au sein de la nébuleuse que constitue le réseau d’ONG IDH, qui pourraient servir de gage pour rembourser les épargnants. Notamment entre les réalisations immobilières de Lomé dans le quartier Tokoin Casablanca, et les centaines (voire aujourd’hui milliers) d’hectares, accaparés à Agbélouvé qui devaient être théoriquement restitués aux habitants du village, après la construction d’un lycée agricole. Mais quand on sait que c’est dans la région d’Agbélouvé que devrait être construit le futur aéroport de Lomé, la question reste ouverte de savoir si les milliers d’hectares seront finalement distribués/restitués aux habitants.
Le Gouvernement RPT/AGO de Faure Gnassingbé fait des interventions unilatérales pour se protéger. En effet, rien n’empêche ce Gouvernement de rembourser d’abord les épargnants afin de soutenir l’activité économique et ensuite de se retourner, par les voies légales – c’est-à-dire devant un Tribunal républicain et indépendant menant une enquête et sanctionnant les véritables responsables – et se faire payer en retour si les responsables sont solvables. Mais, si une enquête devait déboucher sur l’existence de blanchiments d’argent impliquant le terrorisme international, alors on comprend que Mme Hilary Clinton ne pourra pas être patiente très longtemps si IDH-microfinance continue d’exister. Il faut d’ailleurs se rendre à l’évidence que sur Lomé, IDH faisait plus dans la macro-finance que dans la microfinance.
4. RECOMMANDATIONS : STOPPER LES INTERVENTIONS INTEMPESTIVES DU RPT/AGO DANS LA JUSTICE
Convaincu que seule une action judiciaire pourra faire émerger la vérité des comptes indispensable pour préserver les intérêts des épargnants, CVU-Togo-Diaspora à la lumière de ces nouveaux faits :
conseille aux épargnants adhérents du réseau IDH micro finance de se grouper en association de société civile pour pouvoir déposer plainte devant le tribunal de Lomé et exiger le remboursement des sommes dues, à un Etat interventionniste qui ne protège que les intérêts de l’Etat et non ceux des épargnants spoliés ;
demande aux Etats-Unis de continuer leur investigation sur le blanchiment d’argent et les liens possibles entre le milieu libanais et togolais mafieux, les trafics de tous genres et les conditions de rentabilité passées d’IDH-microfinance ;
recommande au Gouvernement de payer en totalité les sommes dues aux épargnants et de demander à la justice togolaise indépendante de faire son travail, en commençant par une enquête afin de faire jaillir la vérité des comptes sur l’IDH-microfinance.

Dr Yves Ekoué AMAÏZO
Coordinateur Général

François FABREGAT
Secrétaire Général

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