Trois (03), c’est le nombre de personnalités étrangères enregistrées dans notre pays ce début de semaine : Daniel Carmon, Laurent Fabius et Dirk Niebel. Le premier est le Directeur général de la Marshav, l’Agence israélienne de coopération internationale et est dans nos murs pour une visite inscrite dans la dynamique du renforcement de la coopération entre l’Israël et le Togo; le second est Français et est à Lomé pour former des cadres de l’administration ; et le troisième, ministre allemand de la Coopération économique et du développement est là dans le cadre de la reprise de la coopération. Le Togo est devenu fréquentable, dira-t-on au sein du sérail. Et comme il fallait s’y attendre, cette dernière visite justement a encore offert l’occasion aux officiels de se produire, particulièrement le Premier ministre Gilbert Fossoun Houngbo.
« Le Togo a fait des avancées notables dans des domaines de la promotion de la démocratie et des droits de l’homme, dans la bonne gouvernance économique et dans l’apaisement politique », c’est ce qu’a servi à l’hôte allemand Gilbert Fossoun Houngbo, après que ce dernier a été gavé d’un exposé sur les « réformes politiques et économiques réalisées au Togo depuis 2005 » au ministère des Affaires étrangères où il rencontrait une batterie de membres du gouvernement. Décidément c’est le même refrain chanté. Mais où sont alors les fameuses avancées notables ?
Elections transparentes, Etat de droit, respect de la Constitution et des droits humains, voilà des éléments de jauge de la démocratie dans un pays. Mais il se fait qu’au Togo ces vertus sont rares. Si des élections sont effectivement organisées dans notre pays, les résultats proclamés ne reflètent malheureusement pas les suffrages exprimés par les électeurs. Le vote des populations est détourné au profit du candidat du pouvoir, et les électeurs n’ont pas le droit de contester. Et si des téméraires le font, ils en paient de leur vie. Avril 2005 l’illustre assez bien. Ils étaient un millier de Togolais à avoir perdu la vie pour avoir osé descendre dans les rues pour défendre leurs suffrages. Mars 2010 est à vite oublier, s’agissant de transparence et de vérité des urnes. Le système VSAT censé sauver la crédibilité des résultats a été saboté pour créer un terreau favorable au détournement des suffrages. La suite, tout le monde la connaît. Le challenger du candidat du pouvoir a été dépossédé des procès-verbaux qui devraient lui permettre de prouver sa victoire réclamée, et ils ne lui sont pas rendus jusqu’à ce jour. Pas sûr que de telles infamies puissent survenir en Allemagne, l’une des démocraties traditionnelles du monde occidental.L’avancée notable, est-ce le fait d’exclure de l’Assemblée nationale des élus du peuple ? L’apaisement politique chanté est-il possible dans ce cas ? Peut-on oser parler d’avancée lorsque le détenteur actuel du pouvoir manœuvre pour faire vingt (20) ans au pouvoir alors que la loi fondamentale fixe le maximum à dix (10) ans ?
La bonne gouvernance, si c’étaient des mots, des réformes sur papier qui sont des recommandations des bailleurs de fonds, alors on peut concéder que le Togo est champion là dedans. Mais il se fait que ce sont des actes, des actions. Mais malheureusement en la matière, notre pays n’est pas une référence. La bonne gouvernance suppose la transparence dans la gestion des finances publiques, dans la passation des marchés. Mais voilà, dans le cadre de l’offre du marché d’exploitation du phosphate carbonaté, les choses n’ont pas été faites dans les règles de l’art. A travers des gymnastiques de prestidigitateur, le marché était ou sur le point d’être concédé à la Sultan Corporation de Derek Lenartowicz, avec qui étaient entamées des négociations exclusives. Un marché d’une centaine de milliards de FCFA qui allait être cédé de gré à gré ! La manœuvre a heurté la sensibilité de la Banque Mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) qui ont remis en cause l’appel d’offres et obligé l’Etat togolais à en lancer un autre. « Sous la pression de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), qui conditionnent leur appui à la relance de la filière phosphate – sinistrée – à la pratique de la bonne gouvernance, Lomé a rejeté l’offre de Sultan Corp. La compagnie australienne était la seule à postuler à l’appel à candidatures. L’Etat s’apprête désormais à lancer une nouvelle compétition « plus ouverte » », révélait le journal électronique spécialisé Africa Mining Intelligence (AMI) dans sa parution n°261 du 14 novembre dernier, information que nous avions reprise dans notre livraison n°1094 du 16 novembre.
La bonne gouvernance chasse de facto la corruption. Mais il se fait que malgré les discours et autres professions de foi, le fléau a le vent en poupe dans notre pays. Il est même béni, dira-t-on. Le dernier classement de Transparency International est assez illustratif. Le Togo fait partie des quarante pays les plus corrompus au monde, sur un total de 183 concernés par ce classement, et figure au même rang que le Nigeria qui était entre-temps désigné comme le pays le plus corrompu au monde.
Voilà des faits qui parlent d’eux-mêmes. Mais les officiels parlent d’avancées notables sur le plan de la bonne gouvernance. Malheureusement, ces déclamations affectent les sens des hôtes qui aussi versent dans des déclarations peignant le Togo comme un eldorado terrestre. « Le Togo connaît, depuis 2007, des évolutions positives. Des élections démocratiques ont eu lieu et le pays est aujourd’hui sur la voie de la stabilisation de la démocratie, de la réconciliation nationale et de la normalisation des relations internationales », a déclaré le ministre allemand. M. Dirk Niebel s’est même permis de lancer « un appel à tous les acteurs politiques à participer au dialogue inclusif afin de trouver un accord sur les reformes constitutionnelles et institutionnelles pour pérenniser les avancées des dernières années », occultant complètement les contours de ce fameux dialogue.
Tino Kossi
source : liberté hebdo togo

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