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Mardi 21, premier jour de Deckon II, des images émouvantes ont fait le tour des écrans de télévision. Avec des dispositions tactiques des forces de l’ordre contre les manifestants pacifiques, des convois des munitions et des renforts, on se croirait à la seconde guerre mondiale.
 
Depuis un certain temps, une vague de contestation populaire sociale et politique s’organise à l’encontre du régime pharaonique du plus « Faure » de Lomé. Les 12, 13 et 14 juin et 21, 22 et 23 août, des manifestations de plusieurs milliers de personnes ont lieu à l’appel du Collectif « Sauvons le Togo », pour réclamer plus de justice, de démocratie et d’Etat de droit. Faure Gnassingbé refuse d’enclencher les réformes, s’entête au pouvoir et adopte un ton plus dur. Il renforce le mouvement de répression et lance des forces de l’ordre contre les populations soulevées pour dénoncer la dictature et l’oppression, faisant des blessés graves et des morts. Les milices sont envoyées au front. Jeudi 23 août, le Togo a failli frôler l’insurrection. Des échauffourées sont organisées dans certains quartiers de Lomé et de ses environs. Le pouvoir en place sort les militaires des casernes pour venir à bout des manifestants.
 
Et pourtant à l’approche des échéances électorales, l’approfondissement du dialogue démocratique est inscrit comme l’une des priorités du gouvernement Ahoomey-Zunu. « Les discussions et les consultations seront engagées par le gouvernement pour favoriser l’examen, dans un esprit d’ouverture et sans sujets tabous, des mesures susceptibles de contribuer à l’organisation d’élections apaisées, répondant pleinement aux normes et aux standards internationaux en matière d’élections libres, démocratiques et transparentes », lit-on dans la déclaration de la politique générale du nouveau Premier ministre. Mais en lieu et place, ce sont des courses poursuites, des tirs de grenades lacrymogènes. C’était prévisible.
 
En effet la nomination de Gilbert Bawara ou de Col. Yark Damehane qui incarnent la ligne dure du pouvoir à des ministères clés, traduisait la vraie intention de Faure Gnassingbé, contrairement à ce qui est annoncé dans la feuille de route. Aujourd’hui l’horizon semble s’éclaircir jour après jour. Faure demeure toujours dans la logique de conserver le pouvoir et de diriger avec une main de fer le pays. Et tous les moyens sont bons pour défendre l’héritage familial. Il ne veut pas perdre le pouvoir car son papa l’avait averti : « Quand vous perdez le pouvoir, il vous sera difficile de le retrouver ».
 
En refusant d’écouter son peuple et en optant pour la logique répressive pour défendre son pouvoir illégitime, Faure Gnassingbé serait en voie d’emboiter le pas au président syrien Bachar el-Assad, à la seule différence que dans le cas togolais, les armes lourdes n’ont pas encore commencé à crépiter. Mais la logique répressive y est. Le conflit syrien a débuté dans les mêmes conditions, que le Togo pour finalement gagner tout le pays. Malgré la répression et les concessions du régime, le mouvement s’étend aux principales villes du pays. Des manifestations de soutien à Bachar el-Assad sont également organisées en réponse (elles se terminent souvent également par des bains de sang), et le Président syrien continue de gouverner, faisant fi des recommandations.
 
Si loin si proche, Faure et Bachar ont le même pedigree. Bachar el-Assad docteur en médecine, au pouvoir depuis juin 2000, a succédé à son père, Hafz el-Assad décédé suite à un accident. A la mort de son géniteur, la constitution fut toilettée, lui permettant de briguer la magistrature suprême. Mêmes conditions d’accès au pouvoir pour Faure Gnassingbé.
 
Tableau comparatif
 
À la mort du président Hafez el-Assad, le Parlement amende la Constitution pour abaisser l’âge minimum de candidature à la présidentielle, qui passe de 40 à 34 ans. Bachar el-Assad est promu deux jours plus tard Général en chef des Forces armées syriennes par le Vice-président Khaddam. Le parlement le propose comme président de la République le 25 juin 2000. Il promet de mettre en œuvre des réformes économiques et politiques en Syrie, et est élu président de la République par un référendum qui s’est tenu le 10 juillet 2000, le peuple syrien voyant en lui un réformateur qui démocratiserait le pays.
 


 
À la suite de son élection, le régime se libéralise timidement, ce qu’on appelle le « Printemps de Damas ». Des centaines de prisonniers politiques retrouvent la liberté, des forums regroupant des intellectuels parlant de la démocratisation de la Syrie et de la fin de l’état d’urgence en vigueur depuis 1963 voient le jour. Sous la pression de la vieille garde du régime, Assad met fin à ce mouvement libéral en déclarant qu’il y a des limites à ne pas franchir. Il fait arrêter des dizaines d’intellectuels. Il réalise cependant quelques réformes économiques. La libéralisation économique du pays a été très limitée, l’interventionnisme de l’État reste extrêmement présent. Il s’inspire du modèle chinois en proclamant que « les réformes économiques passent avant les réformes politiques ». De démocratie, il n’est plus question. En 2003, il explique que les opposants avaient « mal compris » les promesses de son discours d’investiture. Les sanctions économiques mises en place par les États-Unis compliquent la situation. Mais Bachar el-Assad, rattrapé l’aspiration de son peuple aux libertés individuelles et la démocratie opte pour la répression systématique.
 
Faure Essozimna Gnassingbé est l’un des fils de l’ancien président togolais Gnassingbé Eyadéma. Il a une licence en économie et en gestion de l’Université Paris-Dauphine et un MBA de l’Université George Washington. Il a été député au sein du Parlement togolais pour la circonscription de Blitta, sous l’étiquette du Rassemblement du peuple togolais (RPT), puis nommé ministre des Travaux publics, des Mines et des Télécommunications dans le gouvernement de Koffi Sama le 29 juillet 2003. Sa nomination en tant que président de la République était déjà prévue, en raison du mauvais état de santé de son père. En décembre 2002, Gnassingbé Eyadema fait amender la Constitution du pays, avec entre autres mesures, l’abaissement de l’âge nécessaire pour être président de 45 à 35 ans, âge qu’avait son fils à cette époque. Ceci aurait permis à Faure Gnassingbé de se présenter à l’élection présidentielle de 2003 au cas où Eyadema ne pourrait pas s’y présenter.
 
À la suite du décès de son père le 5 février 2005 et d’un coup d’État constitutionnel soutenu par l’armée, Faure Gnassingbé est nommé président. Sous la pression de l’opposition, de l’Union africaine et de la communauté internationale, il renonce d’abord à être président jusqu’au terme du mandat normal de son père et annonce une élection dans les 60 jours. Puis il renonce à la modification de la constitution votée en toute hâte au lendemain de la mort de son père pour évincer le président intérimaire Fambaré Ouattara Natchaba, président de l’Assemblée nationale, longtemps bloqué par l’armée togolaise à la frontière béninoise. Enfin, le 25 février, il renonce à son mandat de président par intérim et se porte candidat à l’élection présidentielle.
 
Comme Bachar el -Assad, Faure après sa forfaiture, se présente comme l’homme de la rupture. Mais par la suite l’opinion découvre le vrai visage de l’homme. Fraudes électorales, déficit démocratique… le Prince choisit la répression brutale avec la complicité des « sécurocrates » pour se maintenir au pouvoir.
 
Pierre Claver K.
 
source : lalternative-togo.com
 
image 27avril.com
 

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