Transparence dans la gestion des fonds, lutte contre la gabegie, le gaspillage ou encore le détournement des deniers publics, tous ces défis qui se résument à la bonne gouvernance économique sont chantés de jour comme de nuit par « l’Esprit nouveau ». Et pourtant, au ministère du Commerce et plus précisément à la Division de Contrôle de la Concurrence et de Prévention des Fraudes, Mme Améyo Adovon excelle dans le détournement des fonds que payent en guise d’amendes pour non-conformité des barres de fer aux normes requises, les quincailleries. Et ce, sous les regards complaisants de M. Abé Talim, directeur du commerce intérieur.

 
« Mon pays va mal ». En chantant cela, le Reggae man ivoirien Tiken Jah Fakoly ne croyait pas si bien dire. Le Togo aussi va mal. Très mal. Tandis que certains s’arrachent les cheveux pour se payer le luxe d’avoir un ou deux repas par jour, d’autres tissent et bâtissent leur empire financier sur l’argent de tout le monde, des fonds qui sont censés être reversés à la Régie, mais qui diantre, se retrouvent dans les poches de certaines personnes. Et Mme Ameyo Adovon fait partie de cette seconde catégorie de Togolais. La parcelle de responsabilité à elle reconnue, – elle est chef Divion de contrôle de la Concurrence et de la Prévention des Fraudes-, elle l’utilise à des fins d’enrichissement personnel illicite. En tant que telle, et sous bonne escorte, elle est censée faire des contrôles impromptus sur pièces dans les établissements de vente de barres de fer,donc dans des quincailleries ainsi que dans des usines qui opèrent dans ce secteur. L’idée, c’est de s’assurer de la conformité des biens visés aux normes : bars de 6, de 8, etc. Un objectif tout à fait noble. In fine, l’on devrait aboutir à assainir le monde de la quincaillerie par des sanctions financières infligées aux exploitants qui font le commerce de barres de fer non conformes aux normes requises. Des amendes que Mme Adovon et son équipe devraient recouvrer pour alimenter la Régie et de ce fait, le Trésor Public. Et pour ce faire, une Brigade de contrôle leur est affectée. Evidemment pour leur éviter des ennuis avec certains opérateurs qui seraient tentés de leur opposer le langage des muscles.
 
Pourtant, une bonne partie de ces fonds n’atterrit pas à la Régie. Mme Améyo Adovon, d’après des informations crédibles, les détourne purement et simplement. Le modus operandi est celui-ci : en lieu et place de la Brigade dirigée par le C.B. Arouna, elle se paye les services d’un individu qui présente les traits apparents d’un élément des forces de l’ordre. Une sorte d’usurpation d’identité s’opère aux dépens de la Brigade qui, elle, s’ennuie. La suite, c’est que la dame encaisse les fonds d’amende et délivre à ses vis-à-vis une simple reconnaissance de recouvrement de créances. Ce reçu, tenez-vous bien, est manuscrit et porte juste l’en-tête du Ministère du Commerce et la signature de la dame. Quant à son cachet, il est plutôt invisible sur la pièce. Cette pièce n’a en tout cas rien d’un document comptable, comparée à celles traçables que la dame a eu la gentillesse de nous montrer. Et le plus intéressant dans l’histoire, c’est que le badaud, pardon, le « gros bras » est très bien rémunéré. 50.000FCFA, c’est évidemment le montant qu’il empocherait à chaque opération, pour ses bons et loyaux services rendus à sa chef. Cinq opérations de ce genre par mois et tout calcul bien fait, le faussaire se retrouverait à 250.000 francs le mois. Hummm ! Voilà qui doit aiguiser des appétits et faire des envieux parmi les fonctionnaires d’Etat. En tout cas, c’est un sacré facteur de motivation. Et à la fin, tout le monde est content. Sauf bien sûr le citoyen lambda, tous les partisans de l’orthodoxie financière et bien sûr le Trésor Public. Enfin s’ils sont au courant de cette affaire. Car la loi de l’Omerta a pendant longtemps régné dans cette affaire. Motus bouche cousue. «Rien, mais alors absolument rien ne devait être fait pour nuire aux intérêts de la Chef Division de Contrôle de la Concurrence et de la Prévention des Fraudes», semble être la consigne donnée. A preuve, contacté par notre rédaction, le Commandant de Brigade qui commande le détachement affecté à cette division, nous a plutôt envoyés bouler, après que nous l’avons briefé : « Je ne peux rien vous dire de plus sur cette affaire. De par ma qualité, je ne suis pas autorisé à vous parler, à moins que mes supérieurs hiérarchiques ne me donnent des instructions dans ce sens ».
 
La dame semble en effet bénéficier de la complicité de ses supérieurs et du coup, serait une forteresse imprenable. D’ailleurs son premier réflexe lorsque nous lui avons révélé les faits qui l’incriminaient, a été de nous dire qu’elle nous accompagnerait voir son supérieur hiérarchique, M. Abé Talim, directeur du Commerce Intérieur. Selon les informations, quoique au courant des agissements de dame Adovon, il n’aurait jamais levé son petit doigt pour la rappeler à l’ordre ni pris des sanctions disciplinaires la visant. Et après nous avoir fait poireauter pendant au moins une heure, ce dernier a remis à sa protégée, des documents qui selon lui, devraient la laver de tout soupçon. Or ces documents ne comportaient pas le descriptif de toutes les opérations. Certains établissements manquent sur la liste. Pis, le supposé rapport délivré par Dame Adovon à son supérieur hiérarchique ne portait ni sa signature ni son cachet. Seulement la date. Pourquoi ?
 
Inutile de se poser cette question. Tout s’étant probablement fait dans la précipitation, certains détails ont pu leur échapper. A la question de savoir pourquoi elle ne délivre que des reçus, elle répond : « nous ne pouvons procéder qu’ainsi». Mais elle rassure, ou du moins tente de le faire: «à chaque fois, sur les papiers que nous faisons sur le terrain, que ce soit la convocation ou la fiche de renseignements, nous faisons tout pour avoir une traçabilité. On met chaque fois Ministère du Commerce et le cachet de la Direction. On met toujours les timbres et le cachet de la Direction sur le document. Je ne vois donc pas là où se situe le problème, si j’ai eu à faire un rapport, (ndlr : non signé) ». A-t-elle fulminé. Or les preuves sont là et attestent que les reçus incriminés ne portent ni les timbres du Ministère du Commerce ni le cachet de la Direction (Voir encadré. Des passages de ce reçu ont été enlevés exprès, pour épargner à certains établissements que l’on accuserait à tort de nous avoir vendu la mèche, de subir des mesures de représailles).
 
Autre question : la Brigade les accompagne-t-elle dans leurs opérations « mains propres » et descentes impromptues? Elle est formelle : « vous pouvez aller interroger la Brigade. L’unique cas où elle n’a pas été escortée par la Brigade, martèle-t-elle, c’était dans une affaire de siphonage de ciment » et patatras. La dame nie en outre avoir délivré des reçus de payement par échelonnement. Car, dans ces cas de figure, seuls ses supérieurs transigeraient avec les opérateurs en question. Comment se règlent ces affaires entre ses supérieurs et les opérateurs qui sont dans ces cas, elle n’en pipe mot. En réalité, elle assure n’en savoir rien. Mais aussi surréaliste que cela puisse paraître, et suivant des documents fiables en notre possession, elle a délivré des reçus constatant des versements échelonnés d’amendes (Cf. second encadré, dont certaines mentions sont laissées en blanc, pour les mêmes raisons que celles précédemment citées).
 
Eh oui ! Tout ou presque semble incriminer Dame Adovon. L’ironie du sort, c’est qu’elle dirige un département qui prévient entre autres les fraudes. Tel est pris qui croyait prendre. La Cour des Comptes elle, peut toujours demeurer dans sa léthargie et continuer de jouer sa fonction décorative. Et la lutte contre la fraude, les détournements de fonds publics, la corruption, renvoyée aux calendes grecques . Pauvre Togo !
 
Magnanus FREEMAN
 
 
source : | liberte-togo.com
 

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