Les grands hommes d’une Nation, ce sont ceux qui se sont illustrés par des actes de bravoure, de dignité, bref des actes qui portent haut le flambeau du pays. Au Togo, on peut citer Sylvanus Olympio et compagnie qui ont arraché de haute lutte la souveraineté nationale et internationale, François Akila-Esso Boko qui a refusé de cautionner le massacre de ses compatriotes en avril 2005 pour permettre la montée au trône de Faure Gnassingbé. On ne peut bien sûr pas ignorer le tout dernier héros national, Koffi Kounté qui a eu le courage de dire la vérité malgré les menaces de mort dont il a été l’objet. A contrario, il y en a qui ont décidé d’entrer dans l’Histoire du Togo à reculons. Eux, ce sont ceux qu’il convient d’appeler « Les Tortionnaires de la République ». Leurs noms ont été révélés dans le rapport de la Commission nationale des droits de l’Homme (Cndh).
 
Cpt Kadanga N’guwaki
 
L’homme s’est illustré comme le plus attentionné à l’égard des détenus de l’Agence nationale de renseignement (Anr) dans le dossier Kpatcha Gnassingbé. « …Je leur avais même donné le coran à lire, ils étaient bien nourris, ils se douchaient deux fois par jour », a-t-il dardé comme réponse, à une question de la Commission d’enquête lors des auditions. Waouh ! Des prisonniers, qui plus est à l’Anr, qui se douchent deux fois par jour, on est tenté de fredonner ce passage de la pub sur le détergent « So Klin » : « …propreté ya dévié », c’est-à-dire qu’on n’y badine pas avec la propreté. Monsieur Moussa Seidou l’accusait de l’avoir frappé au moment de son interpellation et soumis à la diète pendant deux jours. En guise de réponse, Tonton Kadanga lâche : « C’est faux, je lui avais servi de l’eau glacée à boire ». Dites, de l’eau glacée, fût-elle obtenue à partir d’un bloc de glaçon convoyé tout droit du Groenland, pour calmer les coups et la faim ?
 
Tous les témoignages concordent que durant les nuits, les agents venaient régulièrement taper fortement sur les portes des cellules pour empêcher les détenus de dormir. Mais notre « champion » a tenté de balayer du revers de la main ces accusations en se permettant au passage d’enquiquiner Dieu : « Eux-mêmes faisaient du bruit en priant ». Etaient-ce des veillées de prière de vendredi dans ces églises dites réveillées, du genre « Jésus descendra le dernier jour » ou « gagner les âmes de dernière heure »? Les détenus avaient-ils des baffles et autres appareils de sonorisation à l’intérieur des cellules ?
 
Comme pour montrer sa bonne foi de n’être pas au pays au moment des faits, le Capitaine a versé au dossier une autorisation de sortie du 1er septembre 2010 signée du ministre de la Défense et des Anciens combattants aux termes de laquelle il est autorisé à se rendre à Accra en République du Ghana du 02 septembre 2010 au 05 août 2011 inclus, pour suivre le stage de « Senior Staff Course ». On espère bien que le document n’est pas artificiel, antidaté ou postdaté.
 
Cdt Kuloh Kodzo, quel culot !
 
C’était le spécialiste des démentis. « Non », « c’est faux », « je ne reconnais pas ces faits », ce sont les genres de réponses que Monsieur connaît. Apparemment le commandant a raté sa vocation. « J’ai traité monsieur Towbeli avec beaucoup d’humanisme ; c’est lui-même qui avait entre-temps refusé de prendre ses produits », a-t-il dardé. Mais alors avec un tel humanisme, pourquoi diantre a-t-on affecté le Commandant à l’Anr ? Sa place est sans doute dans les organisations caritatives ! Mais ce dont on est par contre sûr, c’est que Monsieur Kuloh ferait le « plus pire » des comptables. Tenez.
 
« Monsieur Kassiki Esso détenait une somme de 1.010.000 FCFA…Nous avions prélevé 10.000 FCFA sur la somme qu’il détenait pour s’occuper de lui à l’ANR. Le jour de son transfèrement, il restait environ 2.000 FCFA que nous avons envoyés à la DCPJ », déclare-t-il. Mais, 10 000 FCFA ôtés de 1 010 000 F donne 1 000 000 et non 2 000, mon Commandant ! La calculatrice utilisée par Monsieur Kuloh pour effectuer les calculs serait-elle par hasard en « dérangement » – pour reprendre les termes d’Atcha Titikpina ? On parie que ce sont ces calculettes traficotées du genre de celles utilisées par les échangeurs de monnaie du côté d’Aflao Border qu’il a utilisées. Et le reste de l’argent, il a ouvert un compte bloqué au nom de Monsieur Kassiki pour qu’il en jouisse à sa sortie de prison ou bien comment ?
 
Sergent Addi Kpatcha
 
Avec un tel petit nom, il devrait être enclin à bien traiter les détenus, puisqu’ils étaient des amis de son homo Kpatcha Gnassingbé. Mais ce n’était pas le cas. Vous ne le saviez peut-être pas, « c’est l’ANR même qui achetait les produits anti moustiques et les mettait à leur disposition ». Celui-ci s’est fait prendre très facilement. « Il y a mes adjoints », a-t-il répondu à la question sur ceux qui gardaient les détenus lorsqu’il allait chercher les repas. Mais c’est la suite qui est assez ridicule. « Mais qui sont-ils ? », monsieur répond : « Je ne les connais pas ». N’est-ce pas drôle que le Sergent ne connaisse pas ses adjoints ?
 
Le Cpt Pali Yao, le Maréchal Des Logis Chef Essobiyou, le Maréchal Des Logis Chef Bobozi Biki et autres sont dans de beaux draps. Le rapport de la Cndh a bien reconnu qu’il y a eu tortures tant physiques que psychologiques, privations d’aliments et d’eau, fouilles indécentes et humiliantes. « A la lumière des faits ci-dessus, la Commission constate qu’il a été commis sur les détenus des actes de violences physique et morale à caractère inhumain et dégradant », y lit-on. Et de facto toutes ces personnes mises en cause par les détenues sont reconnues coupables de ces crimes imprescriptibles.
 
Massina, Titikpina, Yark
 
« La Commission n’a pas pu toutefois établir que ces actes ont été commis sur instruction des Autorités de tutelle desquelles relèvent les structures où ces personnes ont été détenues », précise le rapport. Mais le Colonel Yotroféï Massina, Yark Daméhane, les tout premiers responsables des lieux de détentions où ces inculpés dans l’affaire Kpatcha Gnassingbé ont été détenus, l’Anr et le camp Gendarmerie, et Atcha Titikpina, à l’époque ministre de la Sécurité et de la Protection civile et aujourd’hui chef d’Etat-major des Forces armées togolaises (Fat) peuvent-ils être dédouanés ?
 

 
Ils étaient bien au courant de ces mauvais traitements infligés aux détenus, et certains les ont bien cités, tant au cours du procès que lors des auditions et des confrontations. Ils étaient acteurs, témoins ou même ordonnateurs de certaines séances de tortures. M. Dontéma a avoué qu’à son arrivée à l’Anr, à sa réponse lors d’un interrogatoire dirigé par le patron du coin en personne qu’il ne savait rien du coup d’Etat en préparation, celui-ci a donné l’ordre au Capitaine Kadanga de « le traiter ». Il ajoute que le 21 septembre 2010, « le Lieutenant-Colonel Massina l’a passé de nouveau à tabac en présence du Maréchal Des Logis Chef ESSOBIYOU Béténa et lui a craché dessus ». Lors de sa déclaration du 23 septembre 2011, Esso Gnassingbé a dit avoir été « menotté, mis à genoux, encadré par des agents et soumis à un interrogatoire par le Colonel Ttitikpina qui donnait l’ordre au Capitaine Ouadja de temps à autre, de serrer davantage les menottes lorsqu’il n’était pas satisfait des réponses » qu’il lui donnait, une séance dont se délectaient aussi les Col Yotroféï Massina et Yark Daméhane. Durant le procès en septembre 2011, des détenus avaient déclaré à la barre que le Gal Atcha Titikpina faisait convoyer à l’Anr des personnes de son Tchamba natal pour y être torturées.
 
Quoi qu’on dise, tous ces messieurs sont trempés jusqu’au cou dans cette affaire de torture, un crime imprescriptible, et il va falloir qu’ils répondent de leurs actes. Déjà le rapport recommandait de « prendre des sanctions exemplaires à rencontre de toutes les personnes ayant participé directement ou indirectement à la commission des actes incriminés ». Des personnes ayant participé directement à ces traitements cruels, inhumains et dégradants, on peut citer les exécutants Cdt Kuloh Kodzo, les Cpt pali Yao et Kadanga N’Guwaki, le Sergent Addi Kpatcha, les Maréchal des logis Essobiyou, le Maréchal des Logis Chef Bobozi Biki et le Col Yotroféï Massina ; et indirectement Atcha Titikpina et Yark Daméhane. Et dans ce lot le « Leader nouveau » ne doit pas être épargné, car c’est sous sa responsabilité suprême que se trouve l’Anr. Si sur le plan local, Faure Gnassingbé n’arrivait pas à prendre ses responsabilités, Luis Moreno Ocampo ne serait pas mécontent de les accueillir. Toutes les conditions sont réunies pour que ces gens soient transférés à la Cour pénale internationale (Cpi). La torture est un crime imprescriptible et la lutte contre ce fléau est une affaire de toute l’humanité.
 
Tino Kossi
 
liberte-togo.com

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