Nous en parlions déjà dans la parution de vendredi. Le Cadre permanent de dialogue et de concertation (Cpdc) était jeudi à sa 9e séance de discussions. Après avoir statué sur les conditions d’éligibilité à la présidence de la République qui oblige le candidat à satisfaire le critère de nationalité (Togolais d’origine), de santé physique et morale assermentée par des médecins, d’âge (entre 35 et 75 ans), entre autres, les membres sont parvenus à s’entendre sur la durée et le nombre de mandats. Le mandat devra durer cinq (05) ans, comme depuis toujours, et il n’est renouvelable qu’une seule fois. « Le président de la République est élu au suffrage universel direct et secret pour un mandat de cinq ans. Il est rééligible une seule fois. Le Président de la République reste en fonction jusqu’à la prise de fonction effective de son successeur élu », lit-on dans le compte rendu de cette 9e session.
La limitation du mandat présidentiel est l’une des questions devant lesquelles le pouvoir Faure Gnassingbé se braque à chaque fois qu’elle est évoquée. On peut donc se permettre de parler de victoire, d’autant plus qu’en l’état actuel de la Constitution, le nombre de mandat n’est pas limité. Ce qui induit que Faure Gnassingbé peut rester au pouvoir autant d’années qu’il veut. Mais la suite des dispositions ne devrait pas faire sourire. Le Cpdc propose « l’adoption d’une disposition transitoire de clarification pour préciser que les dispositions de l’article 59 relatives à la limitation du mandat ne sont pas rétroactives».
La loi n’est pas rétroactive, c’est une constance, et cette proposition du Cpdc qui deviendra loi une fois passée à l’Assemblée nationale ne pourrait pas s’appliquer à la mandature actuelle qui a débuté depuis le 4 mars 2010 et court jusqu’en 2015. Mais cette mesure arrange particulièrement un homme, un seul : Faure Gnassingbé. Cela induit que les deux mandats de dix ans qu’il aura faits (2005-2010 et 2010-2015) ne comptent pas, et les compteurs seront remis à zéro en 2015. Après avoir supporté trente-huit (38) ans durant le Père, qui n’a été emporté du pouvoir que par la mort un 5 février 2005, les Togolais devront donc souffrir voir le Fils égrainer au moins vingt (20) ans sur le fauteuil. Sans compter ce qu’il pourrait advenir au terme de cette seconde série de dix ans. Allusion faite ici à une probable sodomisation de la Constitution, comme l’a fait le « Vieux » en décembre 2002 pour jouer la prolongation en 2003.
Il faut dire que cette situation est la résultante de cette stratégie mise en branle à l’époque par le Père qui avait mis le bistouri dans la loi fondamentale de notre pays et sauté le verrou de la limitation de mandat. Le Fils, pourtant un « esprit nouveau », ne s’est pas donné la peine d’extirper ces écueils de la mouture de la Constitution, lorsqu’il fut obligé de se retirer du fauteuil pour revenir en avril 2005 par les urnes (sic) et les massacres. Ce n’est donc pas fortuit s’ils ont été maintenus.
Les réformes discutées aujourd’hui au Cpdc, elles sont recommandées par l’Accord politique global (Apg) du 20 août 2006. Voici depuis cinq ans donc qu’elles auraient pu être matérialisées si la volonté politique y était ; mais le régime en place a poussé le plus loin possible l’échéance, usant du dilatoire, histoire de faire perdre du temps. Le Cadre permanent de dialogue et de concertation recommandé n’a été mis en place que très tard. Selon les règles consensuellement admises, il ne devrait être ouvert qu’aux partis ayant réalisé un score de 5 % de suffrages aux législatives du 14 octobre 2007. Mais le pouvoir en place a mis le pied dans le plat et ouvert le cadre à ses partis satellites et à des leaders qui ne sauraient même représenter légitimement leur famille génétique. Ce qui avait suscité une levée de boucliers et un boycott de certains partis de l’opposition. Et même ce cadre n’avait réussi à rien faire. La plus grande action à mettre à son actif, c’est l’organisation du cinquantenaire de l’indépendance du Togo et l’érection de bustes à l’image de tous les chefs d’Etat du Togo sur la place de l’Indépendance. Pas un seul pas sur le chemin des réformes constitutionnelles et institutionnelles. C’était visiblement du dilatoire pour occuper et détourner l’attention de l’opposition, et ainsi faire perdre du temps et permettre à Faure Gnassingbé d’entamer son second mandat avant de s’exécuter. Assez bien réfléchi donc.
Généralement c’est par action personnelle, par tripatouillage de la Constitution que le pouvoir Rpt offre à son candidat une présidence élastique. Faire 20 ans ou plus au pouvoir ne serait pas pour déplaire à Faure Gnassingbé, et si cela n’en tenait qu’à lui tout seul, il voudrait bien battre le record de son défunt père. Mais cette fois-ci l’histoire retiendra que c’est l’opposition qui l’aide à s’offrir un bonus de dix ans. Le commun des Togolais s’étonne que ses représentants au Cpdc ne soient pas arrivés à obtenir l’effet immédiat de cette limitation de mandat. Doit-on alors considérer l’aval donné à la non rétroactivité de cette limitation de mandat comme une complicité de leur part, et le Cpdc même comme une structure de légitimation du long règne de Faure Gnassingbé?
Au demeurant, c’est bien triste qu’au moment où à côté Yayi Boni s’est engagé à se retirer du pouvoir en 2016 après ses deux mandats, malgré toutes les réalisations faites au Bénin, son alter égo du Togo, pourtant dit « esprit nouveau » manœuvre pour rempiler.
T. K
source : liberté hebdo togo

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