BAMAKO – La junte qui a pris le pouvoir au Mali le 22 mars était vendredi plus que jamais sous pression, après la menace d’un embargo aux conséquences potentiellement désastreuses brandie par l’Afrique de l’Ouest si l’ordre constitutionnel n’est pas rétabli d’ici lundi.
 
Les putschistes et leur chef, le capitaine Amadou Sanogo, se trouvent désormais face à une alternative: céder à l’ultimatum de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ou plonger le Mali, très pauvre et enclavé, dans un isolement funeste.
 
Déjà, des interrogations se font jour sur la manière forte employée par les chefs d’Etat de la Cédéao face aux auteurs du coup d’Etat militaire contre le président Amadou Toumani Touré (ATT), qui affirme ne pas être prisonnier mais reste introuvable.
 
A Genève, le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, Saïd Djinnit, a estimé que les sanctions brandies « visent essentiellement la junte » mais admis que « si cela dure, cela peut avoir une conséquence pour le pays ».
 
« Il faut espérer que les pressions combinées de la société civile (…) qui appelle au retour immédiat de l’ordre constitutionnel, avec celle de la communauté internationale, finiront pas porter des fruits », a-t-il ajouté.
 
« Si on accule complètement les putschistes, ils risquent de se raidir davantage », prévient une source diplomatique occidentale à Bamako interrogée par l’AFP, qui aurait préféré plus de « souplesse » dans un premier temps.
 
Les chefs d’Etat réunis jeudi à Abidjan autour du président ivoirien Alassane Ouattara ont choisi une méthode radicale, qui n’est pas sans rappeler l’attitude de l’Afrique de l’Ouest face à la Côte d’Ivoire quand l’ex-chef d’Etat Laurent Gbagbo avait refusé de céder le pouvoir en 2010-2011 après sa défaite à la présidentielle.
 
La Cédéao a menacé le Mali d' »un embargo diplomatique et financier » sans retour à l’ordre constitutionnel « dans un délai maximum de 72 heures », soit lundi « au plus tard ».
 
Un climat qui se détériore
 
L’asphyxie de ce pays très fragile passerait notamment par une fermeture des frontières, une fermeture de l’accès aux ports des pays côtiers de la zone et un gel des comptes du Mali à la banque centrale ouest-africaine (BCEAO).
 
Les membres du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE, junte) sont aussi menacés de sanctions incluant une interdiction de voyager et un gel des avoirs dans la région.
 
Ces menaces font suite à l’échec d’une médiation jeudi à Bamako de M. Ouattara et d’autres chefs d’Etat de la région, qui ont annulé leur venue au dernier moment après une brève manifestation pro-junte sur le tarmac de l’aéroport.
 
Jusque-là, les putschistes se sont efforcés d’instaurer un état de fait, multipliant les mesures visant à une normalisation, notamment l’adoption d’une Constitution censée régir la transition jusqu’aux présidentielle et législatives dont la date n’est pas déterminée.
 
Ils savent pouvoir s’appuyer sur l’adhésion d’une partie de la population, scandalisée par les conditions de vie difficiles de l’immense majorité de la population et écoeurée par la corruption.
 
A Bamako, le climat s’est détérioré ces dernières heures, avec trois blessés graves lors de l’attaque du QG du front anti-junte par des partisans des putschistes. Et la presse internationale est de plus en plus prise à partie par les soutiens du nouveau régime.
 
Le nouveau pouvoir fait aussi face à une grave menace intérieure: la nouvelle rébellion touareg, qui a émergé mi-janvier, et des groupes islamistes armés profitent de l’incertitude politique à Bamako et continuent de progresser dans le nord du pays.
 
Les troupes loyalistes font face depuis jeudi à un assaut des rebelles et des islamistes à Kidal, une ville stratégique prise en étau depuis plusieurs jours.
 
La junte avait invoqué l’échec du régime d’ATT contre la rébellion pour justifier son putsch.
Afp/20minutes.fr
 

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